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Closing Night: Pearl & John ou les chers blessés roses

PLuc Tuymans
@12 Jan 2008

Beaucoup de mystère entoure Pearl & John. Musiciens? Plasticiens? Vidéastes? A vrai dire, les résumer à un seul genre serait commettre une grossière erreur. Le binôme d’artistes semble vouloir avant tout questionner, susciter, soulever. En effet leurs travaux naissent et doivent s’entendre dans un brassage d’inspirations artistiques.

Difficile de trouver une trace de leurs parcours. Ils sont à la fois partout et non identifiables. Depuis 2000 pourtant, ils conçoivent et réalisent des pièces musicales et sonores. Basant leurs projets sur un texte, une action ou un dispositif, ils s’illustrent dans des productions variées: action-chant, lecture amplifiée, installation performance, song writing. Tels des initiateurs plutôt que des icônes, ils préfèrent garder la lumière pour leurs œuvres.

Avec un appel plus qu’un message derrière chacune de leurs créations, ils se font les guides du visiteur, hôtes engagés pour un discours chaque fois plus affûté.
Cette fois, c’est sur le terrain de la littérature qu’ils choisissent de procéder.
Se réappropriant la tragédie Hamlet, ils partent des ultimes mots du héros avant de mourir «the rest is silence» comme l’expression d’une fin flottante, d’une mort suspendue. Les Chers Blessés roses, la signature de la manifestation, vient illustrer la meurtrissure mise en scène dans la célèbre pièce.

Closing Night en est la proposition sonore: installations suggestives, prouesses prophétiques. Closing Night se découpe en trois lieux, trois espaces déterminés par différents territoires du drame shakespearien: un cri, un cadavre, une inquiétude.

Sur l’idée de caissons acoustiques, Pearl&John enferment les trois univers de départ, calfeutrant les émotions pour mieux les convertir en sonorités.
On découvre alors Closing Night ou la mise en lumière d’une partition émaillée du sang des Chers Blessés roses. Le chant qui y naît est avant tout une voix, une exhortation, celle d’un corps.
On découvre également Restez tranquille on viendra vous chercher paroles sécures symbolisées par une maison de poupée, jeu pour enfants, noire vernie et au creux de laquelle revient le cri interminable de l’invariable lien mère-enfant.
On découvre enfin Les Chers Blessés roses, deux communiants retenus dans des boîtiers, une allumette en guise de cierge à la main. Cages incendiaires d’où surgit une alarme étincelante.

Avec audace, Pearl&John détournent un classique du théâtre du XVIIe siècle pour en faire un triptyque résonnant et courageusement moderne. En souvenir du passé, les partenaires misent sur le cauchemar, le morbide et la souffrance certes mais sans jamais en ignorer l’esthétique donnant ainsi à leurs édifices tragiques l’aura d’œuvres ardentes.

Pearl & John
— Closing Night, 2007. Installation. Croix. Dimensions diverses.
— Restez tranquille on viendra vous chercher, 2007. Installation. Maison.Tourne-disque. Tissu. Matériaux divers. Dimensions diverses.
— Les Chers Blessés roses, 2007. Installation. 2 Boîtiers rouges, 2 communiants. Drap brodé. Dimensions diverses.

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