ART | CRITIQUE

Claude Como

PLeïla Elyaakabi
@24 Oct 2011

Dans les portraits peints sur fonds monochromes que Claude Como expose à la galerie Métropolis s'entrecroisent des sujets, des univers et des esthétiques apparemment inconciliables. On est subtilement entrainé aux confins de l'art contemporain et des sujets classiques.

La série de portraits féminins, peints à l’huile, combine esthétiquement le contemporain et le classique. Peints d’après des tableaux de maîtres (Léonard De Vinci ou Horace Vernet), les bustes se détachent sur un fond uniformément noir souvent, ou parfois bleu.

Du portrait de départ n’ont été retenues que la chair du visage et une partie du buste. La chevelure et le reste du corps se fondent dans le monochrome d’où se détache la chair rosée et lumineuse pour évoquer l’idéal classique de la beauté féminine: l’harmonie des courbes, la douceur de l’expression, la finesse des traits s’accordent avec la teinte diaphane de la peau.

Les attributs, les aspects anecdotiques d’une scène ou d’un paysage, qui situeraient le personnage dans un contexte, sont remplacés par un monochrome, ce qui rend les portraits intemporels, sans indice pour les situer dans une époque ou un milieu. Tandis que la lumière, qui semble provenir du personnage lui-même, et non d’un extérieur, le fait exister de façon autonome.

Ces Å“uvres procèdent à un traitement radical du clair-obscur: le noir profond sans objet s’oppose de façon tranchée à la chair. Il ne renvoie pas à un arrière-plan sombre. Et son importance dans le tableau n’en fait pas un simple faire-valoir du sujet.

Le tableau au monochrome bleu révèle que cette couleur n’a pas la même consistance que le noir. Le bleu vif s’oppose moins que le noir au rosé de la peau. En jouant sur la complémentarité du rose et du bleu, Claude Como reste dans un traitement radical des couleurs, qui valorise le caractère séduisant du rose. Mais dans tous les cas, en ne gardant du portrait que la lumière de la chair et en l’enveloppant d’un monochrome, elle parvient à une esthétique épurée.

Composée de dix toiles juxtaposées, de divers formats, Méthodologie est une Å“uvre-puzzle où chaque pièce fait partie d’un tout. Mais, à la différence du puzzle, chaque toile est autonome, avec un sujet qui lui est propre. La plus grande évoque le bouddhisme et la transcendance d’un enfant en méditation. Une autre décline le thème du portrait classique sur monochrome vert. Une des toiles reprend un motif végétal chinois, entre figuration et abstraction. Quant aux petits formats, ils représentent des natures mortes, scènes de chasse copiées de tableaux classiques européens.

Au-delà des sujets, qui varient d’une toile à l’autre, le traitement des couleurs confère à l’ensemble un contraste fort. Les fonds monochromatiques rose ou verts vifs de certaines toiles attirent le regard, tandis que les ocres et les bruns opposent une note plus naturelle et plus sobre.
La variété des formes, des couleurs et des sujets multiplie les lectures possibles. Comme le disait Mondrian, on a affaire à un «art des rapports» dans cette œuvre où chaque partie est perçue à travers sa relation aux autres.
En outre, chaque tableau étant mobile, on peut imaginer d’autres combinaisons… Et même rapprocher, par sa structure, cette Å“uvre d’un écran multiple, c’est-à-dire faire s’entrecroiser des références hétérogènes, voire antagonistes.

Au-delà des sensations visuelles et des émotions contradictoires, Méthodologie combine des thèmes et des esthétiques traditionnellement opposés: l’Orient à l’Occident, l’abstrait au figuratif, la chair enfantine nue et rosée à l’expression froide et rigide du portrait…

Par ce tableau-mosaïque, Claude Como met en abîme les concepts d’unique et de multiple. La cohabitation du dessin figuratif et du monochrome au sein d’une même Å“uvre symbolise le dialogue entre l’Un et le Multiple. Les natures mortes et le feuillage chinois illustrent l’idée d’une profusion extrême jusqu’au désordre. A l’opposé, les monochromes offrent un paysage abstrait infini, en écho à la transcendance évoquée par la méditation de l’enfant.

Claude Como se prête à un subtil jeu d’illusions. Le trait s’efface au profit de la suggestion, de l’attrait du vide et du pouvoir esthétique de la couleur vibrant pour elle-même. Les sujets sans contextuel habitent le tableau-support comme ils pourraient habiter notre univers, les monochromes évoquant une infinité qui déborde du cadre.

Å’uvres
– Claude Como, Sans titre, 2011. Huile sur toile. 200 x 130 cm
– Claude Como, Sans titre, 2011. Huile sur toile. 180 x 190 cm
– Claude Como, Sans titre, 2011. Huile sur toile. 180x 190 cm
– Claude Como, Sans titre, 2011. Huile sur toile. 180 x 190 cm
– Claude Como, Sans titre, 2011. Huile sur toile. 200 x 130 cm
– Claude Como, Sans titre, 2011. Huile sur toile. 200 x 130 cm

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