DANSE

Chip Foam

PEmmanuel Posnic
@19 Oct 2009

Première parisienne pour ce jeune Anglais nourri à l'héritage du minimalisme. Pour cohérent qu'il soit, notamment dans sa subtile coordination de matières, son travail pêche par manque d'incarnation.

George Henry Longly expose pour la première fois seul son travail en France. Et c’est sous la bannière de Valentin qu’il effectue cette entrée après avoir déjà figuré au générique d’«Une pensée sauvage» en 2007.
Rien d’étonnant à cela: il s’inscrit à la suite d’expositions et d’artistes montrés depuis plusieurs années entre ces murs. Des convictions communes, un répertoire formel similaire alliant la subtilité du geste à l’attention portée au matériau. Tout ceci fait que cette génération, à peine sortie des meilleures écoles d’art européennes, voisine à merveille dans la jeune galerie du Marais.

Un satisfecit pour les Valentin, un bémol devant les réalisations du Britannique. Malgré la grâce qu’on avait pu lui reconnaître lors de son précédent passage à la galerie, le cru 2009 déçoit quelque peu.

Il n’y a pas de doute, George Henry Longly maîtrise l’espace. Il sait convertir ses oeuvres dans un même contexte de monstration, créant de judicieuses mises en scène du cercle ou signant de belles combinaisons de matières. La structure en verre à l’oblique du mur dont l’ombre dessine des cubes striés; cette zone de peinture à peine tracée sur le mur, comme une apparition fantôme qui affleure à la surface tout en imprégnant profondément le mur; l’équilibre instable de trois demi-cercle de marbre et cette opposition vertigineuse du vide face à la pesanteur des volumes.
George Henry Longly prend un soin particulier à utiliser des matériaux du quotidien (le verre, le plâtre, la laine, le marbre) tout en dévissant légèrement de leur application commune jusqu’à obtenir des objets «contre-nature» et «anti-fonctionnel».

George Henry Longly entretient là ses hommages à la sculpture minimaliste, Robert Morris en tête. Mais sa mémoire est encore plus large puisqu’elle sait regarder du côté de l’art cinétique, bien peu cité aujourd’hui. Et encore plus loin, sa science des matières, ce désir de faire se croiser l’art et l’objet manufacturé place son travail en connexion constante avec les projets du Bauhaus ou, remontant un peu plus la source, jusqu’à ceux du mouvement anglais Arts and Crafts, actifs à la fin du XIXe siècle.

Retenir le matériau avant qu’il ne soit totalement absorbé par l’art. Tel pourrait être le crédo de George Henry Longly. Son formalisme semble se méfier de la cristallisation que contient immanquablement chaque oeuvre. Une cristallisation qui oblige l’auteur à se dessaisir de sa création pour que l’histoire puisse se prolonger dans d’autres intimités. Or George Henry Longly interfère en permanence pour éviter ce glissement. A la place, il met en scène une espèce d’absence, de torpeur lente et morne. Un univers d’objets égarés.

C’est peut-être pour cela que ses pièces sont dépassionnées, qu’elles n’invitent pas à s’y projeter, incapable de déplacer l’attention et la réflexion ailleurs que sur l’objet sauf à dire que ce dernier nourrit d’autres récits, ultime descendance du Ready-made.

George Henry Longly
Vitamin A / Nero Portoro Agglomerato, 2009. Marbre. 140 x 60,5 x 3 cm.
Traditional Matters, 2009. Plâtre. 201 x 318,5 x 1,6 cm.
Untitled, 2009. Miroirs vénitiens striés et contrecollés, attaches. 201,5 x 120 x 39 cm.

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