DESIGN | OBJET

Rocky

Avec Rocky, le designer Charles Kalpakian a conçu une credenza qui défie les perceptions de ceux qui l'observent. En métal poli et texturé, Rocky est une console en trompe-l’œil. Mais plutôt que de jouer sur la perspective pour simuler la profondeur, elle se donne des airs de faux-plat.

Avec Rocky (2012), le designer franco-libanais Charles Kalpakian propose une credenza [crédence, console] aux lignes acérées et souples. Conçue pour l’éditeur parisien La Chance, Rocky prend les traits d’une étagère aux allures cinétiques. Évoquant un treillis, ou une ruche, les casiers-alvéoles de Rocky semblent être orientés de façon latérale. Un décalage visuel qui génère ainsi une impression de perspective aplatie. Et ce, à l’aune d’un minimalisme (coloris uni, tons sobres) qui temporise le degré d’attention monopolisée par cette forme inattendue. Originale tout en cultivant une certaine discrétion, Rocky est fabriquée en métal. Jouant sur les mécanismes optiques de perception de la profondeur de champ, de face Rocky paraît plate, alors que son épaisseur est de près de quarante centimètres. Pour une composition en six casiers, déclinée en quatre teintes (hors commandes personnalisées) : bleu ardoise, rouge brique, noir et gris clair.

Credenza Rocky du designer Charles Kalpakian : un jeu sur l’illusion perspective

Alvéolaire, Rocky arbore des formes géométriques simples. Six casiers ouverts qui semblent s’extruder à partir, chacun, d’un rectangle. Visuellement articulés autour d’un axe vertical central, les trois rectangles de droite semblent se décaler vers le bas ; les trois de gauche, vers le haut. Un jeu simple, qui repose néanmoins sur une culture visuelle acquise et construite. Notamment par l’Art Moderne et sa réflexion sur la spatialisation de la vision. En filigrane de Rocky peuvent ainsi se lire les perspectives paradoxales de Maurits Cornelis Escher (1898-1972). Le non moins paradoxal Échiquier d’Adelson (1995). Les peintures et sculptures géométriques de Victor Vasarely (1906-1997). Ou encore, plus ludique, le jeu vidéo Qbert, sorti sur Videopac en 1982 — année de naissance de Charles Kalpakian. Autrement dit, tout un héritage moderne, concentré sur la perspective en tant qu’illusion. Mais avec, ici, une illusion de platitude, plutôt que de volume.

Design graphique, voire calligraphique : Charles Kalpakian revisite l’Art Moderne

Pièce sculpturale, Rocky de Charles Kalpakian est fabriquée par un artisan qui plie et assemble les feuilles de métal les unes avec les autres. Pour un résultat qui paraît monolithique — tel un origami. Pièce légère, le métal est poli avant d’être texturé à la laque époxy, pour un rendu mat à satiné. Une épure graphique qui se retrouve également dans nombre des créations du designer Charles Kalpakian. À l’instar de ses cabinets en bois, de la collection Cinétisme (2011-2012), pour la Galerie BSL. Ou sa sculpture lumineuse Wall Shadows (2013), pour Nemo. Graphique, voire calligraphique, le design de Charles Kalpakian se développe en suivant des lignes sobres et élégantes. Une manière de revisiter la Modernité (artistique), en combinant matériaux actuels (LED, textile Kvadrat, Corian…), et matériaux atemporels (laiton, bois, grès…). Au sein de réalisations qui valorisent les savoir-faire de l’artisanat contemporain.

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