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Cet été, je ne partirai pas en vacances

C’est dit, c’est inscrit: «Cet été, je ne partirai pas en vacances». La sentence ressemble à un aveu d’échec et forme un écho à la crise internationale du moment. Car si la période estivale signale un net ralentissement de la vie sociale et politique du pays, elle ne freine pas les tensions, les difficultés et les exclusions de toutes formes.
La période peut être aussi propice pour faire reposer la marmite. Et mettre en perspective les questions qui nous agitent. C’est la position que retient le Point Ephémère ici en passant commande à une dizaine d’artistes, illustrateurs et collectifs de graphistes sur la base d’un sondage de l’institut Ipsos: «51% des français ne partiront pas en vacances cet été».
Phrase sibylline mais qui en dit long sur le degré d’infiltration de la crise dans les us et coutumes de la société française.

Et l’actualité estivale n’a fait que relayer ces inquiétudes. Mais ce que dit l’exposition, c’est qu’au-delà de ce renoncement (et derrière lui, c’est la mise en berne de l’image des premiers congés payés ou du programmatique «travailler plus pour gagner plus»), il y a la place pour organiser la réflexion et le sursaut.
«Cet été, je ne partirai pas en vacances» sonne donc comme un message antidote à l’échec, une résolution à bricoler avec intelligence le peu qui nous reste.

L’exposition le fait avec humour. Les artistes claquent des textes vengeurs, des illustrations qui fleurent bon la contestation adolescente.
«—Ils prennent pas les tickets-restos; —attends, les tickets-restos c’est quand tu travailles… là c’est les vacances…», sourit Jean-Jacques Vanier dans l’une des citations placardées sur les murs de l’exposition.
Pas de répit pour le grand capital, l’exposition se veut évolutive jusqu’au dernier jour. Et participative: la photographe Renata Bueno propose à chacun de venir nourrir de son autoportrait les branches d’un arbre sérigraphié, histoire d’entretenir le feu d’un acte collectif et, qui sait, peut-être décisif.

En parallèle et même si la passerelle reste encore à franchir, l’exposition met en lumière les planches de Willem, grande figure du dessin satirique depuis ses premiers pas dans L’Enragé en 1968, en passant aujourd’hui encore par Charlie-Hebdo et Libération. Ce sont d’ailleurs les dessins d’actualité parus dans ces deux journaux qu’il affiche ici, au rythme de l’information estivale. Nicolas Sarkozy, Barack Obama, les élections en Afghanistan forment le miel de sa critique joyeuse et libertaire. Le trait de Willem est toujours aussi classieux et, à l’opposé, ses illustrations toujours aussi sauvages.
Le BigMac logé entre les fesses des obèses, les ministres abandonnés par Sarkozy comme des chiens sur le bord de la route des vacances, le bras droit levé de Le Pen arraché et emporté par Marine, la barbe des mollahs transformée en toboggan vers l’enfer. Pas vulgaires juste tranchants, cyniques et terriblement sarcastiques. Il rabote pour nous les velléités des puissants, se moquent avec jubilation des dérives dans lesquelles ils se noient.

Willem n’est effectivement pas parti en vacances, pour le plus grand bonheur des oisifs. Rendez-vous le 18 septembre sur place pour faire le bilan définitif de l’exposition et voir les ultimes travaux…

Willem
Sans titre, juillet-septembre 2009. Dessins.