ART | CRITIQUE

C’est quoi dégueulasse ?

PCaroline Pillet
@12 Jan 2008

Artiste aux pratiques multiples (peinture, performance, écriture, sculpture, etc.), Arnaud Labelle-Rojoux s’attaque aux idées reçues, au sérieux et autres bêtises humaines. En politique comme en art.

Artiste aux pratiques multiples (peinture, performance, écriture, sculpture, etc.), Arnaud Labelle-Rojoux expose dans la galerie Loevenbruck ou, plus exactement, il en envahit l’espace. Cet envahissement n’est toutefois pas une déclaration de guerre, sauf peut-être contre les idées reçues, le sérieux et autres bêtises humaines.
Le titre de l’exposition, C’est quoi dégueulasse ? fait penser à la dernière réplique de Jean Siberg dans A bout de souffle de Jean-Luc Godard — à Belmondo qui lui dit qu’elle est «dégueulasse», Siberg répond «C’est quoi dégueulasse ?».

Dégueulasse, cette exposition pourrait l’être selon les défenseurs du beau, du sensible, qui semblent réapparaître aujourd’hui, car les œuvres d’Arnaud Labelle-Rojoux ne sont pas lisses. Ses dessins sont souvent simples et présentés sur des feuilles de papier accrochées à même le mur.
Dégueulasse, parce que provocatrice et anti-conformiste. Dégueulasse, parce que Arnaud Labelle-Rojoux ne se gêne pas pour faire descendre les mythes de leur pied d’estale, comme dans ce collage où une photo de Sartre est accompagnée de ces mots : «Quand je pense que Diogène passait son temps à se branler au soleil».

On aborde l’exposition par le rire, un rire salvateur suscité par cette gigantesque souris grise qui nous accueille à l’entrée de la galerie. L’Homme se mesure alors à l’aune de cette souris. Métaphore de notre désir vaniteux de grandeur ou simple farce ? La question reste sans réponse, à moins que l’artiste ne désire cheminer du côté de nos peurs enfantines, de nos cauchemars et névroses.

Arnaud Labelle-Rojoux ne se prend pas au sérieux, sans pour autant en manquer. Car ses œuvres sont autant de railleries qui frappent juste. Il utilise tous les supports : dessins, sculptures, photos, collages, slogans écrits à même le mur, découpes de presse, etc. Il est également l’auteur de plusieurs livres dont L’Acte pour l’art, qui mêle histoire de l’art contemporain et style provocateur. Iconoclaste politique et polémique, Arnaud Labelle-Rojoux nous plonge dans un univers de fête foraine et de cirque où le clown risque bien d’être celui qui se prend le plus au sérieux.

L’artiste joue sur les mots, les images et les décalages. Les sculptures présentées sont comme issues d’un magma, comme Dionysiac, une paire de sein surplombée de deux grappes de raisin. Les titres des œuvres sont à eux seuls signifiants comme A présent nous savons parfaitement distinguer le bien du mal (2005), ou Trois rondelles de tofu et le sang du christ avec dieu sans prise de poids ! (2005). Ils interrogent de façon humoristique nos visions moralistes et réduites du monde.

Artiste du détournement et de l’événement — ce temps qui rompt avec le cours ordinaire des choses —, Arnaud Labelle-Rojoux considère l’art comme un moment de rire et comme une pratique perturbatrice et féconde qui remet en cause nos visions ordinaires. Il crée des micros contre-pouvoirs qui permettent de questionner un certain ordre établi, politique ou artistique.

Arnaud Labelle-Rojoux :
— C’est quoi dégueulasse ?, 2005. Polystyrène, peinture, tissus. 300 x 150 x 200 cm.
— Peint avec la bite, 1993. Acrylique sur toile. 33 x 41 cm.
— Et pendant ce temps, Magritte bosse, 1993. Acrylique sur toile. 46 x 38 cm.
— Dyonisiac, 2005. Mousse polyuréthane peinture, objets . 45 x 45 x 16 cm.
— À présent nous savons parfaitement distinguer le bien du mal, 2005. Mousse polyuréthane, collant, peinture et adhésifs sur toile. 140 x 130 cm x 20 cm.
— Qualis artifex (pereo), 2005.Mousse polyuréthane, latex, peinture, grenouilles en plastique, socle en métal. 49 x 25 x 22 cm.
— La couche d’ozone protège du Diable, 2005. Toutes Acrylique sur papier. 21 x 21 cm.
— Elvis syndrome, 2005. Toutes Acrylique sur papier. 21 x 21 cm.
— Trois rondelles de tofu et le sang du christ (…), 2005. Toutes Acrylique sur papier. 21 x 21 cm.
— Shake papy shake !, 2005. Toutes Acrylique sur papier. 21 x 21 cm.
— Meat Power, 2005. Toutes Acrylique sur papier. 21 x 21 cm.
— Les Ravages de la Vodka frelatée en ex-URSS, 2005. Toutes Acrylique sur papier. 21 x 21 cm.
— Ahhh Parisss, 2005. Plâtre et mousse polyuréthane sur bois . 92 x 103 x 18 cm.
— The Mask of The Damned, 2005. Mousse polyuréthane, peinture et objet sur bois. 80 cm x 80 cm.
— Je pense parfois à cette scène (…), 2005. Ecriture murale, mousse polyuréthane et peinture sur bois. Dimensions variables.
— Aviator, 2005. Mousse polyuréthane, objets, sur bois. 98 x 50 cm.
— Presse comique, 1990. Collage et crayon sur papier. 21 x 29,7 cm.
— Moule d’élevage, 1994. Crayon et photo sur papier. 65 x 42 cm.
— V&V, 1997. Collage et pointe bic sur papier. 31,5 x 24 cm.
— Pierre, Paul, Jacques, 1997. Collage et crayon sur papier. 12,5 x 20 cm.
— In Memoriam Elvis, 2004. Feutrine noire et peinture sur papier. 40 x 30 cm.
— La Soif d’amour, 1996. Collage et crayon sur carton. 30 x 20 cm.
— Le dégoût …, 2005. Crayon sur papier. 44,5 x 31,5 cm.
— Tête à cloaque, 1996. Collage sur carton. 16 x 12,5 cm.
— Gardien des catacombes, 1999. Pointe bic sur papier collé sur carton. 15 x 10 cm.
— KKK, 2005. Collage sur papier. 19,5 x 16 cm.
— Œdipe, 1997. Pointe Bic sur papier. 18 x 13 cm.
— Le Pêcheur de perles, 1994. Pointe Bic sur papier. 29,5 x 21 cm.
— Diogène, 2005. Feutre et collage sur papier. 25 x 18 cm.
— Arafat, 2005. Peinture, collage et graphite sur bois. 43 x 37,5 cm.
— Pile ou face, 2005. Collage, peinture et graphite sur papier. 40 x 30 cm.
— Merleau Ponty, 1997. Crayon sur papier. 50 x 65 cm.
— Munster, 1997. Collage, peinture, crayon sur papier. 43 x 32 cm.
— Dante, 2005. Graphite sur papier. 65 x 50 cm.
— L’Extase, 1987. Collage et crayon sur papier. 26 x 20 cm.
— Paradise Now, 2005. Impression jet d’encre, grattage et graphite sur carton. 24 x 30 cm.
— Gildalida, 2005. Collage sur carton et lettrage autocollant sur vitre. 50 x 65 cm.
— L’Acteur, 2005. Encre sur papier. 26,5 x 20 cm.
— Expérience limite, 1997. Crayon sur papier. 35 x 27 cm.
— La Révélation de Sainte-Nitouche, 1987. Collage et crayon sur papier. 26 x 20 cm.
— Le Pêcher, 2005. Collage, peinture, graphite sur papier. 40 x 30 cm.
— Apparition diabolique d’Hitler, 2005. Collage, peinture sur papier. 28 x 23 cm.
— Toi aimer art, 2005. Collage et crayon sur papier. 19 x 15 cm.
— Avant l’attaque, 1994. Carte postale, pointe bic sur fiche carton. 15 x 21 cm.
— Lagerfeld kezaco, 2005. Impression jet d’encre et feutre. 21 x 21 cm.
— À présent nous savons (…), 2005. Encre, crayon sur papier. 65 x 50 cm.
— L’Art du monochrome, 1994. Acrylique sur toile. 34,5 x 27 cm.
— Lolo et Nono, 2005. Crayon acrylique sur papier. 72 x 21 cm.
— Fillettes, 2005. Crayon sur papier. 24 x 30 cm.
— HA HA !, 2005. Carte postale, peinture sur papier. 24 x 18 cm.
— Malabar, 2005. Collage, peinture et crayon sur papier. 20 x 15 cm.
— Idéal ?, 2005. Peinture, collage, graphite sur carton. 36 x 30 cm.
— Eddie Constantine, 2005. Terre, peinture sur bois. 40 x 30 cm.
— Le Reste n’est que littérature, 2005. Collage sur papier. 30 x 24 cm.
— Pasolini, 2005. Collage et crayon sur papier. 21 x 15 cm.
— Angoisse atomique, 1997. Crayon sur papier. 10 x 15 cm.
— Rostand, quelle horreur !, 2005. Crayon sur papier. 20 x 20 cm.
— Les Idylles romantiques, 2005. Crayon et adhésifs sur papier. 30 x 24 cm.
— Une Bonne déglingue au LSD, 1994. Photographie, crayon sur bois. 36 x 26 cm.
— L’Art allemand, 1999. Acrylique sur papier. 98 x 66 cm.
— La Cravate de curé, 1989. Collage, feutre et crayon sur papier. 30 x 22 cm.
— Gens, 2005. Collage et crayon sur papier. 30 x 24 cm.
— Delaunay assassin, 2002. Collage et graphite sur papier. 65 x 50 cm.
— Vive la révolution !, 2005. Collage et graphite sur papier. 51 x 34 cm.
— Ce n’est qu’un au revoir, 2000. Acrylique sur papier. 32 x 24 cm.
— L’accent russe, 2005. Collage, graphite et autocollant sur papier. 40 x 30 cm.
— World Culture, 1996. Crayon sur papier. 29,7 x 21 cm.
— Ça c’est Paris !, 2000. Encre de chine sur papier. 20 x 15 cm.
— Just a gigolo, 2005. Crayon et collage sur fiche cartonnée. 20 x 12,5 cm.
— Écrire tue !, 2005. Graphite sur papier. 20 x15 cm.
— Club privé, 2005. Collage, graphite sur papier. 100 x 70 cm.
— La Dignité est l’alibi des faibles, 2005. Collage et graphite sur papier. 36 x 24 cm.
— Le vrai visage de Fantomas, 2005. Collage et feutre sur carton. 51 x 36 cm.
— Faces, 2005. Diptyque video. Durée 30’ et 1’. Couleur. Support DVD.
— Satanaze, 2005. Peinture, mousse polyuréthane, toile et bois. 168 x 78 cm.
— Al Dente, 2004. Mousse polyuréthane, latex, métal. 48 x 40 cm.

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