ART | CRITIQUE

Catch

PNicolas Villodre
@14 Jan 2009

L’entrée en matière n’est jamais évidente. Encore moins pour un peintre ou une peintresse réaliste. Jusqu’à quel point peut-on perdre de vue le sujet au profit de l’objet ? Qui est, finalement, toujours un peu le même : la peinture, cela va de soi.

 

Le pigment de l’existence. Celle du peintre, s’entend. La couleur. Et parfois aussi la coulure. La bavure. Entrer dans la matière. Et pas trop dans le détail. Katharina Ziemke a peint un cheval à terre, mort ou agonisant, avec, à côté de l’animal inanimé, un cavalier, comme le spectateur, désarçonné. Un cavalier bleu ou d’une autre teinte, n’importe ! Qui est passé par le filtre monochrome de la peinture-peinture. Qui se réfère à sa propre aventure. Pas qu’au qu’en dira-t-on. Autrement, à quoi bon continuer comme ça ? Comme si de rien n’était ?

Bleu Klein. Bleu Monory. Bleu Theotokópoulos. Bleu Franz Marc. Ces peintres, qui font et refont les mêmes gestes. Sur, avec, sans motif. Quelquefois, sans mobile apparent. Le mobile, c’est la quête, l’enquête policière qui le déterminera, en dernière instance. Deux flics, de Miami, deux Dupond pas très joyeux, de San Francisco Bridge ou de LA, près de Mulholland Drive, deux anges bleus virant au vert, l’un, motard, droit dans ses bottes, l’autre de la maréchaussée ou du cheval vapeur, à midi, l’heure de Grimm.

L’éruption, volcanique. L’explosion, caillouteuse, poussiéreuse, rocailleuse. Un peu graveleuse, quand même, il faut bien le reconnaître. La métaphore absolue. La gauloiserie. Le feu aux poudres. Et ailleurs. La dialectique peut casser des adobes. Pas de fumée sans feu ? Pas si sûr que ça.

Le Dobermann. Invention du XIXe siècle. Pure forme impure. Croisement. Au goût douteux. Le royal canin montre qu’il a les dents longues. Le poil court. La peau lisse. Féroce et véloce. Vorace, le Rintintin. Une vie de chien, ce n’est si terrible que cela !

Le garçon aux cheveux verts. Le jeune asiatique émeraude. Hands-up. Hauts les cœurs. S’est sans doute un peu trop cassé la tête. Contre les murs. Le crâne en sang en fait foi.

La cantatrice. Chauve ou pas, on ne saurait vraiment le dire. Emperruquée façon Madame du Barry. Robe à la française, main au panier. Contouche, si l’on veut, en allemand. Pas encore de crinoline, qui ne paie pas de mine. De petits plis Watteau. Des traces carmin de cochenille de-ci, deçà delà. Au bord d’une manche, du collier, du corps sage ou à baleine. La gougoutte de sang de reine Margot fait déborder le vase de Sèvres et celui de Soisson.

Chute du mur. Mur fissuré, figuré, littéralement. Mur-rideau, murs et rideaux déchirés hithcockiens, mur de scène de théâtre. Pas complètement aveugle. Cloison-chassis dont la friable couche de plâtre tombe par plaques.

Portrait décomposé d’un fameux compositeur russe. Le rouge a viré au blanc.

Têtes d’enterrement. De vie de garçon. La jeune fille et la mort. La veuve pas encore joyeuse.

Le garçonnet en short et t-shirt rayé. Le paysage vangoghien.

Katharina Ziemke:
— Lullaby, 2008. Huile sur toile, 100 x 70 cm
— Exil, 2008. 60 x 80 cm
— Dawn, 2008. Huile sur toile, 100 x x130 cm
— Monaco, 2008. Huile sur toile, 70 x 80 cm

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