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Cassandre. 10 ans d’action artistique

Des analyses, des récits, des portraits, des billets d’humeur. Une sélection significative d’articles pour les 10 ans de la revue Cassandre. 10 ans d’engagement sur le théâtre et l’art.

— Éditeur : Éditions de l’Amandier, Paris
— Année : 2006
— Format : 22 x 28 cm
— Illustrations : couleur et noir et blanc
— Pages : 276
— Langue : français
— ISBN : 2-915695-54-7
— Prix : 20 €

Présentation
C’est devenu une banalité de le dire: le théâtre n’est plus au centre de nos sociétés. Il a perdu à leurs yeux l’aura qui le rendait désirable et le pouvoir de conviction qui le mettait en prise avec le monde. Détrôné par d’autres modes de spectacle, rendu opaque par de nouvelles façons d’envisager la représentation et d’utiliser les images, il s’accorde mal, dit-on, avec les modes de vie d’aujourd’hui et l’organisation du temps social. On pouvait encore se faire des illusions jusqu’aux années soixante-dix du siècle dernier, où de nouvelles pratiques scéniques naissaient avec l’ambition de réveiller le vieux corps endormi (Artaud, Brecht, le Living, Grotowski et quelques autres) et où des groupes d’auteurs montaient à l’assaut de formes anciennes, fatiguées d’avoir trop servi.

Si l’on grimpe maintenant sur le promontoire que nous offre 2006, on s’aperçoit que tant d’imagination et d’audace ont tourné court, d’une certaine manière, par la négligence des uns et le narcissisme des autres, mais surtout à la suite de l’effondrement des grandes utopies collectives et de la disqualification simultanée des principes traditionnels et des hautes ambitions assignées aux arts. L’embarras éprouvé devant la nécessité de définir de nouveaux protocoles pour la représentation persiste encore, mais, au sortir d’un long et consternant silence, il se manifeste depuis peu tantôt par des disputes d’érudits menées par une poignée de nouveaux Diafoirus, tantôt par l’occultation systématique des questions soulevées: «Passez votre chemin, il ne se passe rien…»

Mais l’important, c’est que la parole soit revenue et se bouscule aujourd’hui de toutes parts dans les milieux du théâtre, sans toujours trouver les relais nécessaires pour se faire entendre.

Et pourtant, pour qui prend la peine de regarder les choses de près, tout est loin d’être perdu. Les querelles du jour ne sont qu’un pâle revenez-y des vieilles divisions entre le privé et le public, entre le spectaculaire et le dramatique, entre un art qui veut simplement divertir et un autre qui se sent, comme aux origines, comptable des affaires du monde et veut être utile aux spectateurs assemblés. Ne me faites pas dire qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil: je trouve simplement curieux que des antagonismes presque aussi anciens que le théâtre reviennent à l’ordre du jour sous des oripeaux rafistolés. Et que le début ne soit guère arbitré par les acteurs petits ou grands de la scène des arts, qui sont partagés entre une frilosité conservatrice, mère de tous les conformismes et une complaisance étourdie à tout ce qui, dans l’air du temps, a l’éclat du neuf, source de tous les élitismes et esclave sans le savoir des rites de la consommation qui gouvernent notre société.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions de l’Amandier — Tous droits réservés)