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Ça change

PPierre-Évariste Douaire
@12 Jan 2008

Une reformulation des interrogations séculaires sur le temps à travers les moyens d’aujourd’hui : les instantanés photographiques, comme le flux vidéo tentent de saisir cette notion fuyante et délicate.

Marijke van Warmerdam propose un voyage en deux dimensions. Ses œuvres sont duelles, elles doublent le regard que l’on porte sur les choses. Ça change tout le temps, et pour le prouver, l’artiste néerlandaise conçoit des diptyques originaux. Ils représentent la même scène mais sous un éclairage différent. Les montagnes sont vues en été ou en hiver, elles sont vertes ou blanches. Plusieurs systèmes astucieux sont mobilisés pour faire tourner la tête du spectateur.

Comme une fenêtre que l’on ouvre à sa guise, un paysage alpestre est monté à l’endroit et à l’envers d’un panneau que l’on peut bouger à sa guise. Fixé au mur, on peut le rabattre comme bon nous semble. On peut choisir sa saison. L’œuvre est évolutive autant que ludique. Elle prend toutes les options, tous les paris. Une autre fois c’est tête bêche que l’on retrouve les deux cimes accrochées l’une à l’autre. Plus loin c’est un système analogue à celui utilisé dans des tableaux cinétiques qui est repris. Le tableau est ondulé comme de la tôle. Pour pouvoir apprécier le paysage qui se dessine sur les flancs du châssis, il faut se placer sur les côtés. Le regard oblique que l’on porte modifie la vision qui se dégage de l’ensemble.

Ces trois dispositifs veulent coller à cette idée du changement perpétuel. Ils tentent de se confondre avec le mouvement des saisons, en invitant le spectateur à suivre son propre rythme. Que ce soit par la main ou par le regard, chaque regardeur contemplatif agit d’une façon forte ou mesurée. L’effet provoqué amène chacun à se poser la question du temps, de son écoulement. La transformation est au cœur de cette interrogation stoïciennes. «L’arbre n’est pas vert mais verdoit», «tout coule». Justement les photographies et la vidéo présentées sont pris dans cette posture qui oscille entre répétition et transformation. C’est évidemment la vidéo qui permet d’appréhender le plus justement cette épineuse question.

L’écoulement du temps est symbolisé dans la vidéo Weather Forecast (Prévision météorologique, 2000): placée au centre d’une pièce, une baignoire-fontaine, dont le contenu déborde, déverse son trop plein d’éternité. Cette clepsydre qui n’est que vacuité et éternité, ce ressac du temps, est prise entre un éternel recommencement et une transformation perpétuelle. Le tout est relayé par une projection en boucle qui confirme cette idée de retour, de piège, de cercle. L’aspect immuable, inlassable, cet écoulement, ce filet de temps est chamboulé par des éléments climatiques qui changent.

Marijke van Warmerdam reformule des interrogations séculaires sur le temps à travers les moyens d’aujourd’hui. Les instantanés photographiques, comme le flux vidéo sont les deux bornes qui tentent de saisir cette notion fuyante et délicate.

Marijke van Warmerdam
Walkthough Landscape, 2000. Photo
A New Leaf, 2000. Photo couleur, aluminium, plexiglas, bord en métal. 93 x 127 cm.
Walkthrough Landscape, 2000. Photo couleur, aluminium, plexiglas. 100 x 337 cm.
Fake Lake, 2000. Photo couleur, aluminium, plexiglas. 60 x 24 cm.
Flip a Mountain (pink version), 2000. Photo couleur, aluminium, plexiglas. 90 x 248 cm
Weather Forecast, 2000. Vidéo.

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