LIVRES

Beaux Arts magazine n° 253

Inclus, un bien pratique petit guide des 1000 expos de l’été en France et à l’étranger, pour rester un touriste attentif et curieux. Et, pour se reposer des visites, lire les portraits de Pierre Huber et Isaac Julien, le dossier sur les artistes débutants, les articles sur les expos sur l’idiotie et le burlesque, l’entretien avec le ministre de la Culture, etc.

— Directeur de la rédaction : Fabrice Bousteau
— Éditeur : Beaux Arts magazine, Paris
— Parution : juillet 2005
— Format : 22 x 28,50 cm (inclus : le guide des 1000 expos de l’été)
— Illustrations : nombreuses, en couleurs
— Pages : 146
— Langue : français
– ISSN : 0757 2271
— Prix : 6,30 €

Éditorial
par Fabrice Bousteau

Faire «un sot dans le vide». Se mettre à jouer.
Depuis plus d’un siècle, les arts plastiques, la littérature, la musique et le cinéma regorgent d’artistes qui ont joué à faire les idiots. Des créateurs seuls, singuliers, souvent incompris, qui ont pris le risque de rompre avec l’esprit de sérieux. Se mettant souvent en scène en danger et en situation ridicule, ils travaillent a construire des anti-chefs-d’œuvre, Comme l’explique Christophe Kihm, commissaire de l’exposition «Burlesques contemporains» au Jeu de paume, à Paris, cet art repose sur un procédé de «renversement» : «Est donc burlesque un corps en lequel s’opère l’inversion des polarités, que cette dernière s’applique aux lois physiques de la gravité et de l’apesanteur, aux lois sociales de la compétence et de l’incompétence, aux lois musculaires ou morales de la force et de la faiblesse, ou bien encore aux concurrences et aux conflits de la mécanique et de l’humain.» Avec ces artistes, tout s’inverse : la faiblesse devient puissance, le lourd devient léger, le drame devient drôle. Pour Jean-Yves Jouannais, auteur de L’idiotie, art, vie, politique — méthode et commissaire de l’exposition «L’Idiotie. Expérience Pommery #2» au Domaine Pommery, à Reims, il faut considérer «l’idiotie comme mode d’entendement, comme appréhension non intelligente du monde, ou pour aller vite, comme sagesse occidentale». Autrement dit, il faut considérer l’idiotie et le burlesque comme un mode d’emploi nécessaire de la vie. En finir avec le dogme de l’esprit de sérieux et lui accoler l’esprit du jeu.

Mais si l’on joue naturellement enfant, sait-on jouer à l’âge adulte ? L’esprit du jeu proposé par les artistes est plus difficile qu’il en a l’air, il demande une véritable réversion intellectuelle. Comme le montre «le jeu des jeux», le jeu d’échecs, la complexité du jeu est sans limites et les méthodes pour gagner ou perdre (les deux objectifs se valent n’obéissent pas aux règles traditionnellement adoptées par la société. Un pion peut avoir plus de puissance qu’un fou ou un roi. De même, il n’est pas certain qu’un jeu ait une fin. Pour preuve, un étrange jeu créé par Marcel Duchamp. L’artiste, joueur s’il en est et notamment d’échecs, avait créé en 1930 une œuvre intitulée LHOOQ (elle a chaud au cul), présentant la Joconde affublée de moustaches. Cette œuvre acquise par Louis Aragon fut offerte par celui-ci au Parti communiste français. Œuvre quc la secrétaire générale du PC, Marie-George Buffet, vient de mettre en dépôt au centre Pompidou. Une œuvre-jeu qui n’a pas chaud aux symboles.

(Texte publié avec l’aimable autorisation de Beaux Arts magazine — Tous droits réservés)