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Art contemporain, le paradoxe de la photographie

La photographie ne se laisse pas facilement enfermer dans des catégories. Elle présente un côté insaisissable qui oblige l’usager, le critique, le producteur mais aussi le chercheur, à des basculements permanents. Benoît Blanchard propose, dans cet ouvrage, une analyse des enjeux esthétiques, juridiques, économiques et sociaux de ces multiples déplacements.

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Présentation
Benoît Blanchard
Art contemporain, le paradoxe de la photographie

Le monde de l’art contemporain achoppe sur la photographie. L’institutionnalisation de ce médium durant le dernier quart du XXe siècle et son inscription dans le marché de l’art contemporain durant les années 1990 n’y ont rien fait, ses usages et ses images dépassant du cadre. Les exemples de Louise Lawler, William Wegman et Wolfgang Tillmans, témoignent de l’incroyable plasticité des rapports aux images.

Car, de même que les conditions de monstrations ne déclenchent le contenu des discours sur l’art qu’à l’intersection de l’intelligible et du sensible, le rôle de l’artiste est constamment de construire des mondes de l’art et non pas un monde de l’art.

Une photographie peut être une œuvre d’art, tout comme elle peut être l’objet d’une œuvre, la condition d’une œuvre ou, inversement, la condition du sans sans-art. Photographier, c’est se rapporter à tout ce qui n’est pas de l’art, tout en étant au cœur des problèmes artistiques.

«Contrairement au cas de Mapplethorpe où les débats lors du jugement s’étaient concentrés sur la valeur artistique de la photographie, l’œuvre de Serrano dépasse le clivage œuvre d’art/représentation photographique et on ne juge plus la photographie en elle-même, mais l’acte de l’artiste. Plonger un crucifix dans un bol d’urine et le photographier est en soi le cœur du problème. La photographie n’est même plus abordée comme un objet créatif, dans ce cas elle est simplement le résultat d’un acte sacrilège qu’une partie de la société rejette en tant que tel. Ce n’est pas l’exposition de cette photographie qui choque, mais le simple fait qu’elle ait pu être prise et subventionnée par l’Etat.

La véhémence du trouble crée est tel qu’une campagne appelant à l’arrêt des subventions gouvernementales pour les expressions artistiques irrespectueuses de la religion ira jusqu’à déclencher des débats au Congrès américain quant à l’opportunité de punir légalement les actes blasphématoires, et de ne plus permettre qu’ils puissent être protégés par la liberté d’expression. Ces débats amèneront le Congrès à voter l’adoption de l’amendement «Helms», qui interdit à la NEA de subventionner des œuvres relevant de l’obscénité ou du blasphème.
Par la suite, la photographie d’Andres Serrano sera à plusieurs reprises vandalisée. A chaque fois, ce ne sera pas à une œuvre d’art comme symbole que les protestataires s’attaqueront, mais à la photographie comme acte: ni à l’artiste, ni au photographe, mais au «mécréant» qui a osé blasphémer.»

Sommaire

— Préface, par Dominique Sagot-Duvauroux
— Pourquoi la photographie?
— Chapitre I. A la frontière du monde de l’art contemporain
— Chapitre II. Inégalité des rapports à l’œuvre
— Chapitre III. Frontière et enceinte
— Chapitre IV. L’espace commun, transgression et scandale
— Chapitre V. La photographie, l’économie, le culturel et l’art
— Chapitre VI. L’art dans le capitalisme
— Chapitre VII. Art, sans-art, non-art
— Chapitre VII. Du jeu dans l’art contemporain
— Les moments de la contemporanéité
— Bibliographie