ART | CRITIQUE

Anthologie par Jean Nouvel

PAurélie Romanacce
@28 Juil 2008

Dix ans après la mort de César, l’exposition que lui consacre Jean Nouvel à la Fondation Cartier met en lumière ses passionnantes recherches selon trois axes qui ont transformé l’art du siècle dernier: les Compressions, les Empreintes humaines et les Expansions. 

Le jardin de la Fondation Cartier est jalonné par les sculptures en bronze de César : des pouces se dressent fièrement qui dialoguent, à travers les baies vitrées, avec les Expansions colorées présentes à l’intérieur et les agrandissements d’ Empreintes humaines.

En 1965, César procède aux premiers agrandissements du moulage de son propre pouce. Les sculptures présentées ici varient en taille et en matériaux. Des pouces en acier, en marbre rose, en fonte de fer, ou encore en cristal sont disposés au centre de la salle mais aussi dans l’encadrement des baies vitrées, comme s’il s’agissait de vitrines.

Le changement d’échelle des empreintes de pouces, de mains et de seins bouleverse notre rapport aux organes reproduits. Les différences de textures fascinent le regard et suscitent le toucher. Les parties de l’anatomie détachées de leur corps sont transformées en totems.

Formes organiques colorées et brillantes, les «Expansions» n’en finissent plus de se déverser sur le sol. Étalées sur des dalles à peine surélevées, ces sculptures en mousse, rigidifiées et laquées, captivent par leur apparente facilité. Pourtant les formes gardent la trace des interventions de César sur la matière qu’il a dirigée, superposée ou juxtaposée. Une fois la mousse solidifiée, il a procédé au ponçage puis à l’application de fines couches d’acrylique afin d’obtenir un aspect lisse et brillant.

La gestuelle des Expansions  évoque la densité onctueuse de la peinture autant qu’une surface lunaire comme pour l’Expansion n°3 réalisée en hommage à Neil Armstrong.
L’Expansion n° 16 anticipe les Compressions de voitures en des formes compactes et verticales. De couleurs différentes et de formes variées, ces Compressions tantôt verticales ou horizontales constituent un autre pan de recherche et une autre gestuelle.

Les célèbres Compressions sont présentées au sous-sol, nimbées de lumière artificielle. Les voitures Fiat comprimées et étincelantes de la Suite milanaise (1998) forment un dégradé de couleurs en fonction du nuancier proposé par la marque. La peinture a été rajoutée une fois les voitures compressées, contrairement aux premières «sculptures» marquées par la patine du temps.

La série des Championnes réalisée à partir de capots de voitures de course accrochés au mur, lissés par une équerre, donne l’impression d’être une suite d’estampes prises dans les excavations du métal.

Le geste de compression relève pour César de la sculpture. Les déchirures du métal, les enchevêtrements plus ou moins compacts, sont esthétiques par leur densité, leur rythme ou leur couleur.

La scénographie «typologique» de Jean Nouvel est éclairante sans être trop didactique. Elle rend surtout hommage à l’enthousiasme et la passion à créer dont faisait preuve César.

Publication
César, Anthologie par Jean Nouvel, éditions Xavier Barral, Paris, 2008.
 

César
— Expansion no 4, 1969. Polyester armé de fibre de verre et laqué. 13 x 190 x 87 cm
— Expansion no 8 « Les Jumelles », 1969. Polyester armé de fibre de verre et laqué. 50 x 320 x 240 cm
— Hayon Corail, 1986. Élément d’automobile compressé, tôle. 139 x 159 cm
— Championne Corse no 3, 1986. Compression d’automobile, tôle. 201 x 133 x 30 cm
— Pouce, 1968. Aluminium. 90 x 50 x 40 cm
— Sein, 1966. Résine de polyester rose. 90 x 76 x 32 cm
— Poing, 1984. Bronze. 90 x 83 x 190 cm
— Giallo Naxos 594, 1998. Matériaux divers.
— Agacha 316, 1998. Matériaux divers.

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