DANSE | SPECTACLE

Le Grand Bain | Mitten wir im Leben sind

06 Avr - 06 Avr 2018

La pièce chorégraphique Mitten wir im Leben sind d'Anne Teresa De Keersmaeker et les Suites pour violoncelle de Johann Sebastian Bach ont en commun d'être des œuvres savantes et exigeantes, tout en rayonnant d'un fort pouvoir de séduction. Pour une danse complexe et captivante.

La chorégraphe belge Anne Teresa De Keersmaeker (Cie Rosas) s’associe au musicien Jean-Guihen Queyras pour livrer une nouvelle pièce chorégraphique. Le spectacle Mitten wir im Leben sind.Bach6Cellosuiten [Nous sommes en plein milieu de la vie – 6 Suites de Bach pour violoncelle] réunit sur scène six interprètes. Le violoncelliste Jean-Guihen Queyras et cinq danseurs (Anne Teresa De Keersmaeker, Marie Goudot, Michaël Pomero, Julien Monty, Bostjan Antoncic). Offrant ainsi un spectacle qui donne chair aux six Suites pour violoncelle seul de Johann Sebastian Bach (BWV 1007-1012). Une musique veloutée, tout en jeux de gammes et d’oscillations, avec une structure en forme de démultiplications harmoniques. Ligne mélodique virevoltante, tour à tour profonde ou aérienne, au centre de l’espace scénique, Jean-Guihen Queyras rayonne de vibrations. Livrant une interprétation puissante, pour une danse rythmée.

Mitten wir im Leben sind d’Anne Teresa De Keersmaeker : danse céleste des corps graves

Au fil de son œuvre, Anne Teresa De Keersmaeker n’aura cessé d’être attentive à la musique, aux harmoniques (de Steve Reich à Johann Sebastian Bach, en passant par Béla Bartók). Avec Mitten wir im Leben sind, elle compose une chorégraphie entretenant une liaison encore plus intime à la partition. Jouant ainsi sur les trajectoires, translations et traductions. Jusque dans le titre même, qui par sa structure accentue la notion de milieu [Mitten], tout en la décentrant en début de phrase. Une façon de tenir ensemble des mouvements inverses, par une mise en tension des pôles d’intensité. À cette image, les danseurs de Mitten wir im Leben sind conjuguent mouvements virtuoses (pirouettes, pointes…) et mouvements ordinaires (un affaissement au sol, une tentative de se relever…). Entre classique, où la recherche de répétition parfaite confine au machinique, et contemporain, portant une attention accrue aux variations de l’ordinaire.

Les Suites pour violoncelle de Bach comme support et inspiration chorégraphique

Danse circonvolutive, en cercles et spirales (tracés au sol), Mitten wir im Leben sind-Bach6Cellosuiten s’attache à la structure des suites BWV 1007-1012. Parlant de Baruch Spinoza, Gilles Deleuze évoquait les vitesses de la pensée. Soulignant tantôt des moments d’accélération, de fulgurance, tantôt des lenteurs, des moments d’épaississement au sein du raisonnement philosophique. Avec Mitten wir im Leben sind.Bach6Cellosuiten, il y a aussi quelque chose de cet ordre-là. Une exploration des vitesses, des structures géométriques, des strates contenues dans la musique. Une musique composée vers 1717-1723 et considérée comme charnière dans l’histoire de la composition occidentale. Proposant une interprétation chorégraphique des polyphonies du violoncelle, Anne Teresa De Keersmaeker prolonge ainsi la mémoire par le corps. Entre allégorie et écriture géométrique ; entre symbolisme et abstraction mathématique… Elle signe une pièce aussi inépuisable que la musique de Johann Sebastian Bach.

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