ART | CRITIQUE

André Butzer

PMarie-Jeanne Caprasse
@10 Déc 2012

Le peintre allemand passe un nouveau cap vers une abstraction austère et ascétique. Avec la série «N-Bild», il met de côté les couleurs éclatantes jetées sur la toile et les formes tachistes, pour explorer un autre versant de l’abstraction centré sur la suprématie des formes géométriques en noir et blanc.

André Butzer sort des rangs. En tous cas de la grande classification picturale dans laquelle on l’avait rangé depuis ses débuts dans les années 90: le néo-expressionnisme allemand ou encore la «bad painting». Depuis quelques années, le peintre a franchi un nouveau cap vers une abstraction qui, à côté du style excessif auquel il nous avait habitué, semble presque austère et ascétique.

Il y a de quoi être surpris lorsque l’on pénètre dans la première salle d’exposition de la galerie et que l’on est confronté à ces quatre toiles investies d’un motif identique en noir et blanc.
Cette série débutée en 2010 a pour titre «N-Bild» et la seule variation d’un tableau à l’autre réside dans le format. Tous figurent deux formes géométriques noires sur un fond blanc, l’une horizontale et l’autre verticale. L’artiste parle d’une matrice liée à la représentation de corps: un corps vertical vivant qui porte un corps horizontal mort.

On s’interroge. Quelle est l’intention d’André Butzer en réalisant et surtout en exposant cinq fois le même motif dans une exposition? Dans la première salle, face aux quatre toiles presque identiques, c’est la déception qui envahit le spectateur que nous sommes face au dénuement de ce qui lui est présenté. Le motif a la beauté des formes pures mais il n’a rien de particulièrement fascinant. Par ailleurs, ce genre de composition sur fond blanc a un petit air de déjà vu. Quant au noir et blanc appliqué sur ces grandes toiles, ils ne révèlent aucune profondeur et laissent glisser le regard en surface.

Dans le second espace de la galerie, on prend davantage plaisir à contempler cette ultime version en noir et blanc car celle-ci est accrochée à côté d’une grande toile peinte de manière expressionniste, foisonnant de couleurs et de formes vibrantes. Par contraste, le motif géométrique de «N-Bild» prend une nouvelle existence en ce qu’il semble contredire, terme contre terme, la composition voisine. Dans ce rapport dynamique, on trouve enfin là «matière à voir».

La troisième salle présente de plus petits formats. Quatre toiles regorgeant de motifs et de couleurs entremêlés, puis ce que l’on pourrait considérer comme la matrice de «N-Bil» présentant sur papier le motif en noir et blanc de la série. A côté de cette composition coupée au cordeau, les autres toiles n’en semblent que plus libres, fantasques et vivantes.

Au bout de ce parcours, on peut alors considérer ces deux versants d’expression plastique non comme une volte-face mais comme le témoignage d’une recherche formelle du peintre en forme d’aller-retour. Une quête d’absolu qui repose sur les oppositions, dans une démarche qui viserait à atteindre une sorte de yin et de yang du langage pictural.

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