LIVRES

Alain Kirili

6 chapitres pour suivre l’évolution du travail du sculpteur Alain Kirili, depuis ses débuts et ses influences jusqu’à ses travaux les plus récents. Une œuvre épurée qui joue avec les autres disciplines — le jazz notamment — et s’harmonise avec le lieu qui les accueille.

— Éditeur : Flammarion, Paris
— Collection : La création contemporaine
— Année : 2002
— Format : 25,50 x 26 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 191
— Langue : français
— ISBN : 2-08-010831-X
— Prix : 35 €

Introduction
par Robert C. Morgan (extrait, pp. 22-23)

Ce qui m’impressionne toujours chez Kirili, c’est son extraordinaire énergie et son appétit à expérimenter de nouvelles formes, de nouvelles idées, de nouvelles techniques. Si certains artistes américains ont du mal à saisir cet aspect de sa carrière, nous sommes quelques-uns à l’avoir compris. Nous avons appris à respecter son travail et à reconnaître la valeur de ses efforts. L’essentiel, pour lui, est que nous nous libérions des chaînes puritaines qui nous empêchent d’être nous-mêmes, pour atteindre à une nouvelle connaissance du présent et du passé, pour poser un regard neuf sur d’autres cultures et modes de vie, sur la diversité des traditions, des langues, des pratiques sociales. Ainsi, Kirili aime le jazz, et la manière avec laquelle les musiciens américains — notamment les jazzmen afro-américains — donnent libre cours à leurs émotions et à leurs moyens d’expression au travers de leur musique. Le jazz a pris ces dernières années une place importante dans son travail artistique. Il écume avec Ariane tous les clubs de New York. À la fin du concert, ils aiment parler avec les musiciens, parfois ils les invitent à visiter leur atelier et à improviser sur les sculptures. Kirili a inventé une nouvelle forme d’interactivité. Il a trouvé un lien entre jazz et sculpture, dans une relation d’improvisation et de spontanéité.

Ce qu’il défend par-dessus tout c’est la loyauté, l’ouverture, et aussi la possibilité de faire éclore une nouvelle perception de l’art : un art qui ne serait pas servile et confiné, car l’art est un champ ouvert à toutes les possibilités. Il y a, dans la vision de Kirili, quelque chose de salutaire. Il suffit de profiter de l’interactivité qu’il peut offrir : une expérience partagée, mais aussi une expérience éminemment personnelle et intime. Chez lui, il n’y a pas de contradiction. Le social et l’individuel sont sur un pied d’égalité. Voilà les nouvelles conditions que Kirili souhaiterait pour l’art: une entière attention aux autres artistes de tous les coins de la planète. Ce sont ces nouveaux critères qui permettront de relancer le désir de l’artiste d’exprimer ce qu’il ressent et d’en assumer la responsabilité.

Alain Kirili est un sculpteur : il forge et plie l’acier, il modèle l’argile et le fil de fer, il incise la cire et crée des signes calligraphiques, il travaille en interaction avec des musiciens de jazz, contrebassistes, chanteurs, danseurs, saxophonistes. Il est un artiste qui nous permet de saisir la vie à travers son art, d’aiguiser notre connaissance du désir humain afin de transcender l’inanité des intrigues politiques, de descendre dans les profondeurs métaphysiques de nos conflits. Pour paraphraser le poète William Butler Yeats, rares sont les hommes à revenir victorieux d’une descente dans les profondeurs de l’âme humaine. Les artistes, les poètes, les musiciens sont comme des soldats dans la mêlée tentant de sauver leur âme. Nul besoin cependant d’étiqueter la manière d’être au monde de Kirili. Je vois dans son travail une sorte de témoignage des valeurs dont s’inspire la créativité humaine et qui nous aident à nous élever à une nouvelle compréhension émotionnelle qui semble accorder une moindre place aux échanges sur le plan des émotions.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions Flammarion)

L’artiste
Alain Kirili, né en 1946, se consacre essentiellement à la sculpture.

L’auteur
Robert C. Morgan est écrivain, artiste et critique d’art. Il enseigne l’histoire et la théorie de l’art au Rochester Institute of Technology. Il est également correspondant du magazine Art Press à New York.