ART | EXPO

Alain Clément

17 Mar - 09 Mai 2012
Vernissage le 17 Mar 2012

Longtemps limitée aux surfaces planes, l’œuvre d’Alain Clément s’est ouverte depuis une décennie à une nouvelle conception de l’espace. Cette exposition est l’occasion de découvrir un aspect méconnu de ses créations, avec ses œuvres sur papier et ses jeux de montage avec photographies.

Alain Clément

La sculpture des peintres offre souvent une inventivité et une liberté que ne possède pas toujours celle des sculpteurs; on peut expliquer cela par le fait que pour le peintre chacune des deux disciplines constitue un champ d’expérimentation pour l’autre, leur dialogue créant une dynamique mouvante qui leur permet de se développer en spirale et atteindre une dimension qui n’aurait pas été rendue possible sans le secours de l’autre.

Le XXe siècle a été particulièrement représentatif de ces fécondes interactions qu’illustrent magistralement Matisse, Picasso, Miró, ou encore Alberto Giacometti, pour ne citer que quatre figures parmi les plus emblématiques de cette magnifique période. La récente exposition au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris des sculptures de Georg Baselitz vient, s’il en était besoin, confirmer le fait. Au cours de sa jeune histoire, l’Hôtel des Arts a donné à voir un tel dialogue à plusieurs occasions; Alberto Giacometti d’abord, dont le bronze Eli Lotar III faisait face au portrait à l’huile Tête de Diego, puis Per Kirkeby, Antoni Tapiès, Jan Voss et Georg Baselitz, dans les expositions qui leur ont été respectivement consacrées. On pourrait également évoquer Bernar Venet, deux fois exposé à Toulon, dont la sculpture est l’émanation directe de son travail de peintre.

Ainsi, la présence des peintures et des sculptures d’Alain Clément à l’Hôtel des Arts s’inscrit-elle dans un continuum. C’est toutefois la première fois que les deux techniques occupent chacune une place aussi importante dans une exposition. Cette double présence s’impose d’évidence tellement est forte la consanguinité entre les deux médiums et par la place croissante qu’a prise la sculpture dans l’oeuvre de Clément.

Sur le plan artistique en dépit de sa proximité avec les fondateurs du mouvement Support-Surface, Alain Clément résiste aux attraits de la théorie qui submerge une grande partie de l’art français dans les années post 68.

De fait la peinture d’Alain Clément n’a jamais été inféodée à la dictature du temps, tout en dialoguant avec l’époque à laquelle nul ne peut échapper; elle a, au fond, gardé l’émotion de l’enfance et le goût pour la sensualité que lui avaient procurés les Nymphéas de Monet, ainsi que le sens de l’arabesque et des courbes sensibles hérités de Matisse: des qualités d’élégance et de clarté caractéristiques d’une peinture française à laquelle Clément reste profondément attaché et à laquelle il se confronte et s’est construit. Souvent colorée et toujours vivante, sa peinture procède par cycles.

Après des périodes très matiéristes et expressionnistes caractérisées dans les années 80 par un écheveau de barres colorées qui s’entrecroisaient dans un désordre apparent un peu à la façon d’un jeu de Mikado, un nouveau cycle s’est ouvert au début des années 90 avec des compositions plus construites, constituées de bandes qui se coupent orthogonalement, peintes dans un geste plus apaisé. Mais depuis plusieurs années l’angle droit a fait place à la courbe et à l’arabesque qui se déploient sans contrainte dans l’espace de la toile. Une peinture musicale qui évoque la danse.

Décidé à échapper à la planéité du tableau comme avant lui Matisse et Picasso, Alain Clément a depuis une quinzaine d’années abordé la sculpture, non dans l’état d’esprit de Matisse qui prétendait — mais faut-il y accorder foi — que pour lui la sculpture n’était qu’un «complément d’études pour sa peinture» mais comme un deuxième moyen d’expression qui mobilise une grande partie de son temps et de son énergie. Comme Matisse qui disait «j’ai fait de la sculpture comme un peintre, je n’ai pas fait de la sculpture comme un sculpteur», Clément a voulu faire sortir le tableau du mur pour obtenir la profondeur et le volume que la bi-dimensionnalité de la peinture lui interdisait. Pour preuve, et cela le rapproche de Picasso et de Baselitz, il peint à la main un grand nombre de ses sculptures.

L’unité est donc très forte entre les deux moyens d’expression. Toutefois Clément, souhaitant que sa sculpture conquière son autonomie, en a évacué la polychromie au profit de la couleur unique. Cela évite toute redondance et rend la confrontation avec la peinture beaucoup plus puissante. Cette exposition sera l’occasion idéale de le vérifier.

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