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A la limite de la langue

Une exposition organisée cet été à Neuchâtel explorait, à travers des œuvres de la collection Nobel, les liens entre art et médias, et notamment les «formes de détournement des médias et autres stratégies artistiques parasitaires».

Information

Présentation
Sous la direction de Christoph Doswald
A la limite de la langue

Cet ouvrage a été publié à l’occasion de l’exposition «A la limite de la langue — Collection Annette & Peter Nobel / Press Art, au Centre Dürrenmatt à Neuchâtel, du 19 mai au 26 août 2006.

Les médias de masse imprimés sont, depuis le début du XXe siècle au moins, dans la ligne de mire de la culture. Si le «quatrième pouvoir» — ainsi que l’on appelle souvent l’ensemble de ces supports — a soulevé de nombreuses critiques, il est aussi fréquemment mis au service de projets d’acteurs culturels.

Friedrich Dürrenmatt s’est ainsi frotté aux questions journalistiques, achoppé à la médiatisation des images et des informations, jusqu’à devenir co-éditeur du Sonntags Journal et, par conséquent, une figure emblématique de la relation que les personnalités de la culture entretiennent avec la presse. Cet ouvrage s’intéresse aux différentes formes de détournement des médias et autres stratégies artistiques parasitaires dont Dürrenmatt a fait bien plus que d’esquisser les contours.

Extrait de l’introduction, par Janine Perret Sgualdo

« Intellectuels et artistes se sont depuis toujours interrogés sur le sens de l’existence, interrogations qui se sont traduites au cours de l’histoire par de nombreux textes philosophiques et la production abondante d’œuvres d’art. Rares ont pourtant été les penseurs qui ont su exprimer leurs réflexions ou critiques au moyen de plusieurs médias. Friedrich Dürrenmatt est l’un de ceux-là : écrivain et peintre.

Si le Centre Dürrenmatt à Neuchâtel a pour mission de mettre en valeur la pensée et l’œuvre picturale de l’auteur, la peinture y tient une place privilégiée dans un accrochage «permanent». Une situation à relativiser puisque des expositions temporaires viennent régulièrement enrichir notre institution.

A la limite de la langue, révèle la passion d’un collectionneur, l’avocat Peter Nobel qui, en choisissant non pas uniquement des noms prestigieux mais aussi de très jeunes artistes, concentre ses choix sur des œuvres qui établissent un rapport entre le texte et l’image reproduite dans la presse. Une obsession qui, outre son intérêt artistique, révèle des aspects d’une société, la nôtre, qui produit et diffuse sans interruption des images dont la vérité et le sens sont mis en question. Ce questionnement conduit naturellement au doute et ouvre des champs d’investigation que les artistes explorent, traduisent avec les moyens qui leur appartiennent.

A la limite de la langue rassemble des artistes qui s’approprient des images médiatiques, les détournent, les falsifient ou les subliment pour leur donner un nouveau statut. Ils nous donnent à percevoir une Å“uvre d’art, une nouvelle réalité qui pose à double titre la question du sens. Un regard qui s’abîme dans des images tant diffusées qu’elles se transforment en icônes contemporaines même si elles illustrent parfois les pires atrocités qu’un être humain est capable de commettre. […]

L’exposition «A la limite de la langue» propose, au-delà des considérations philosophiques liées à la médiatisation de l’image, des œuvres dont les qualités esthétiques et artistiques s’imposent dans une histoire de l’art qui se conjugue au présent. »