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A la Galerie…A l’Hôtel…

PRaphaël Brunel
@12 Jan 2008

Rejetant l’idée de pureté du médium, Stéphane Pencréac’h met en place une pratique artistique plurielle, qui n’hésite pas à confronter les disciplines et à les parasiter par des objets manufacturés ou des matériaux «pauvres».

Autodidacte et historien de formation, Stéphane Pencréac’h commence à peindre dans les années 90. Il se fait rapidement remarquer par la critique pour sa participation à certaines expositions collectives, qui l’associent notamment à Vincent Corpet, Fabrice Hyber, Michel Gouéry, Daniel Dezeuze, Marc Desgranchamps, Valérie Jouve ou Djamel Tatah.

Refusant toute idée de pureté du médium, il met en place une pratique artistique plurielle, qui n’hésite pas à confronter les disciplines et à les parasiter par des objets manufacturés ou des matériaux «pauvres» comme le plastique ou le polystyrène.

En associant peintures, sculptures et collages photographiques, réalisés pour la plupart entre 2006 et 2007, l’exposition organisée par Anne de Villepoix et Sébastien Nahon rend compte des différentes orientations du travail récent de Stéphane Pencréac’h, de sa nature hétéroclite. L’espace d’exposition de la Galerie Anne de Villepoix est prolongé, pour l’occasion, par celui d’un ancien hôtel particulier de la rue Barbette, dans le Marais.

Pour ses peintures de grand format, Stéphane Pencréac’h pioche dans ses souvenirs et transfigure ces moments-clés qui, de la naissance à la découverte de sexualité, ont participé à forger sa personnalité. Qu’elles soient sombres comme La Grande Nuit ou vives et claires comme C’est une grande vie si vous ne faiblissez pas, ces peintures mnémoniques sont caractérisées par une outrance de la matière, de la couleur, de la figure et du symbole, qui confère aux toiles une attraction violente, qui étend la mise en abîme de l’artiste à l’histoire et à l’imagination du spectateur.

Stéphane Pencréac’h rejette l’idée de pureté de la matière picturale en affublant ses tableaux de jouets, de figurines d’Heroic Fantasy sexy et dénudées ou de mannequins en plastique. L’intrusion de ces volumes nie, comme dans certaines œuvres d’Anselm Kieffer, la planéité picturale et projette le tableau dans une tridimensionnalité, dans une mise en espace possible, qui permet aux œuvres de pénétrer dans la sphère du spectateur, de prolonger une contemplation visuelle en expérience physique. En multipliant les points de vue, il résout à sa manière la grande question du paragone renaissant.

La prise en compte du corps du regardeur se prolonge dans une série de sculptures noires, sombres, qui s’apparentent, par une accumulation d’objets divers, de jouets, d’ordinateurs, de PlayStation ou de poêles, à de véritables ex-voto. Leur structure laisse une place importante au vide et dessine des visages de mort, des évocations funestes, des sentiments de crainte et des relents de guerres. Véritables Vanités, elles suggèrent les errances du monde contemporain et les peurs de l’artiste.

Au Thanatos des sculptures se substitue l’Éros des photographies «trafiquées» de Pencréac’h. Photomontages réalisés à partir d’images pornographiques, réimprimés puis peints sur des toiles qu’il appelle Sublimations, ces œuvres évoquent, au travers de corps morcelés parfois proches de peintures de Bacon, les désirs violents et les pulsions refreinées. Il scinde intentionnellement l’ambivalence du combat intérieur vie/mort pour mieux interroger sa représentation formelle, pour ouvrir l’étendu des possibles.

Ainsi, chez Stéphane Pencréac’h, pulsion de mort et de vie se confrontent dans une œuvre hétérogène, dont les différents éléments semblent unis par une narration implicite, par une cohérence à puiser dans l’histoire de l’artiste et dans les questionnements universels.
 

Stéphane Pencréac’h
— La Grande Nuit, 2005. Huile, bâton et bébé en plastique sur toile. 195 x 130 cm.
— Le Voyeur, 2005. Huile, miroir, photographie sur toile. 195 x 130 cm.
— Première Fois, 2007. Huile et sculpture en plastique sur toile. 195 x 130 cm.
— Le Pont, 2007. Huile, acier, papillons et trous sur toile. 260 x 195 cm.
— La Moitié, 2007. Huile sur toile. 260 x 195 cm.
— Monoghagha, 2007. Huile, coquillages, mannequin, filasse et polystyrène extrudé sur toile.
— Megalodon, 2007. Acier, plastique et bois. 76 x 70 x 81 cm.
— Vol de nuit, 2007. Huile sur toile. 195 x 260 cm.
— Mère archaïque, 2007. Huile, sculpture en bronze et pièces sur toile. 260 x 195 cm.
— Je t’attendais, 2007. Huile et jambe de mannequin sur toile. 260 x 195 cm.
— Le Bain, 2006. Huile, bougie et jambe de mannequin sur toile. 130 x 160 cm.
— Le Rêve, 2007. Huile, photographie, papillon et mannequin sur toile. 195 x 260 cm.
— L’impossibilité pour la mort de se représenter la vie, 2006. Plastique, bois, jouets, plâtre et acier. 160 x 130 x 130 cm.
— Quattro, 2007. Plastique, bois, plâtre et acier. 75 x 85 x 60 cm.
— Rotoror, 2007. Baigneur, plastique, bois, jouets, plâtre et acier. 75 x 75 x 25 cm.
— Solaro, 2007. Acier, bois, verre, plastique, polystyrène, jouets. 97 x 97 x 34 cm.
— Akwaba, 2007. Plastique, bois, résine, jouets, grès. 195 x 140 x 120 cm.
— Bordello, 2007. Plastique, bois, jouets, résine, polystyrène et acier. 300 x 230 x 180 cm.
— La Source, 2007. Plastique, bois, jouets, plâtre, céramique, tissus et acier. 130 x 190 x 170 cm.
— Tu me manques, 2007. Huile, trou et couteau sur sublimation. 160 x 130 cm.
— Viens avec moi, 2007. Huile sur sublimation. 160 x 130 cm.
— Je suis plus douce que toi, 2007. Huile et trou sur sublimation. 160 x 130 cm.
— Est-ce que ça te va comme ça? , 2007. Huile sur sublimation. 160 x 130 cm.
— N’aie pas peur, 2007. Huile sur sublimation. 160 x 130 cm.
— J’aime ça, 2007. Huile et peluche sur sublimation. 160 x 130 cm.
— C’était la dernière fois, 2007. Huile sur sublimation. 160 x 130 cm.
— Tu n’aurais pas dû faire ça, 2007. Huile sur sublimation. 160 x 130 cm.

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