ÉCHOS
01 Jan 2002

20.10.05. Bill Brandt à Fondation Henri Cartier-Bresson

Une centaine de tirages «vintage» du photographe britannique pour la première fois exposés en France. Reportages, portraits, nus et paysages: tout y est, noir sur blanc.

La première salle, juchée au premier étage de la Fondation, rassemble des photographies à tendance documentaire : pendant des années, Bill Brandt s’est penché sur les contrastes sociaux sévissant dans l’Angleterre de l’entre-deux guerres. Une société à visage double : d’un côté, les servantes, la belle toilette, les garden-party, les parties de bridge ou de cricket, les salons «cosy», les chérubins aux joues roses. De l’autre, les enfants des rues, le travail à la mine, le chômage, les pubs, l’inconfort intérieur. Un grand écart social résumé par cette photo où un clochard fouille une poubelle sous le regard méprisant d’un gentleman en costume.

Dans sa série sur les mineurs du nord de l’Angleterre, la photographie intitulée Jarrow (1937), montre un homme voûté sous le poids du labeur quotidien, poussant péniblement son vélo chargé d’un sac de charbon sur le chemin du retour. Une autre montre un mineur, le visage encore noir de charbon, dévorer son dîner sous l’œil attendri de sa femme, avant, enfin, de se livrer à ses ablutions.

Bill Brandt, qui a parcouru l’Europe au début des années 1930, a aussi photographié Londres pendant le couvre-feu, lorsque la ville était assaillie par le «blitz» allemand, qui inaugura la seconde guerre mondiale le 7 septembre 1940. Bombardée le 10 octobre, la cathédrale Saint-Paul a été photographiée par Bill Brandt en 1942. Les habitants trouvaient refuge où ils le pouvaient : on les voit alignés sur un quai de métro, cachés dans une crypte.

Considéré comme un photojournaliste, dont les reportages ont été publiés dans le Weekly Illustrated, Lilliput, Harper’s Bazaar, le Picture Post, ou, aux Etats-Unis, dans Life Magazine, Bill Brandt a progressivement délaissé la photographie documentaire pour la photographie dite «poétique».

Dans la seconde salle, au deuxième étage, on découvre alors sa série de nus, que l’on aura pu voir aussi à la galerie Karsten Greve au mois de septembre à Paris. Jouant des contrastes et des perspectives, Bill Brandt capte des bribes de corps, qui se fondent et se confondent sur une plage de galets gris. Ces morceaux de femmes, parties détachées de leur tout, le corps, se font presque oublier et créent un paysage charnel. On retrouve également toute une série des nombreux portraits réalisés par Bill Brandt qui, comme pour les nus, joue sur la partie et le tout. Saisi en gros plan, l’œil surdimensionné de Jean Arp, Alberto Giacometti ou George Braque espionne le visiteur. Remis dans leur «contexte corporel», Ezra Pound, Pablo Picasso, René Magritte, Francis Bacon, Peter Sellers ou Henry Moore se dévoilent derrière l’œil-objectif.

Enfin, apparaît la série des paysages inspirés de la littérature britannique, dans lesquels exulte une nature sauvagement belle, étrangement vide. Tout comme les rues de Londres, hantées par les fantômes de la guerre, fuyant sous la lumière sourde d’un clair de lune. On retrouve ici l’influence surréaliste chez ce photographe qui fut l’élève de Man Ray et l’ami de Brassaï;.

Anne-Lou Vicente

Informations pratiques
Du mercredi au dimanche de 13h00 à 18h30 – dernière entrée 30 mn avant la fermeture
Le samedi de 11h00 à 18h45
Nocturne le mercredi jusqu’à 20h30
Fermé lundi, mardi et jours fériés
5 € plein tarif
3 € tarif réduit : chômeurs, moins de 26 ans, plus de soixante ans
Gratuit pour les Amis de la Fondation, en nocturne le mercredi (18h30–20h30)

Artiste
Né à Hambourg (Allemagne) en 1904, Bill Brandt vécut une grande partie de sa vie à Londres. Atteint de diabète depuis plus de 40 ans, il y mourut en décembre 1983.

Publications
— Brandt Icons, Bill Brandt Archive, Londres.
— Bill Brandt, Editions La Martinière.
— Bill Brandt, Photopoche n°60, Editions Actes Sud.
— Connaissance des Arts, spécial Photo n°5, octobre 2005.

AUTRES EVENEMENTS ÉCHOS