ÉCHOS
01 Jan 2002

04.02.06. Le mécénat, acteur du développement culturel et artistique

Lors des Rencontres internationales du mécénat à l’Abbaye de Royaumont à Asnières-sur-Oise, le ministre de la culture Renaud Donnedieu de Vabres propose la création d’un club du mécénat associant les institutions culturelles françaises les plus prestigieuses afin d’offrir aux mécènes étrangers des facilités d’accès et des services communs.

Discours de clôture prononcé par M. Donnedieu de Vabres

Chers amis,

Je suis très heureux d’être parmi vous ce soir pour clôturer ces deux journées de partage d’expériences. J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt les derniers intervenants et je suis très satisfait de voir que ces rencontres ont ouvert de vraies pistes pour l’avenir du mécénat en France.

Je suis très fier de voir, grâce à vous, mon pari réussi. Un pari audacieux, puisqu’il consistait à vous « cloîtrer » tous pendant deux jours pour travailler sur ce sujet qui me paraît essentiel. Le superbe cadre que nous avons choisi pour votre réflexion, l’abbaye de Royaumont, aura, je l’espère, offert plus de confort à votre travail. C’est un pari réussi, disais-je, puisque ces rencontres ont pris la forme souhaitée au départ, d’un séminaire de décideurs, qui met sur un pied d’égalité intervenants et participants, configuration assez innovante mais qui aura permis à chacun de vous, je l’espère, de construire un dialogue plus riche.

Je tiens à remercier tous les intervenants, et en particulier ceux qui sont venus parfois de très loin pour nous faire partager leurs expériences. Loin d’opposer un système à un autre, la rencontre a montré au contraire la complémentarité des différentes approches et la nécessité de nourrir les pratiques françaises des réussites de nos pays amis.

Je remercie aussi très chaleureusement, pour l’organisation de ces journées, la Fondation Royaumont, qui a été le théâtre prestigieux de ces discussions passionnantes.

Enfin je tiens à saluer encore une fois nos mécènes et sponsors: la Caisse des Dépôts, la Fondation Gaz de France, la Banque de Neuflize, Total, Groupama, le Crédit Agricole, LVMH, Air France et Vacances bleues, ainsi que la Fondation Florence Gould et la Fondation Bertelsmann en Allemagne. Ces rencontres, comme beaucoup d’évènements culturels majeurs en France, n’auraient pu se faire sans leur soutien.

Chacun, participant comme intervenant, aura, j’en suis convaincu, mesuré le degré de maturité du mécénat en France. Il n’est plus possible aujourd’hui de dire que la France est en retard sur ce sujet. La loi du 1er août 2003 a introduit un changement majeur dans les mentalités, j’en croise tous les jours les expressions les plus riches et les plus variées et ce séminaire en marque une nouvelle étape.

Ces rencontres ont permis d’explorer l’éventail très large des possibilités offertes par le mécénat aujourd’hui. Le nouveau dispositif permet en effet de multiples entrées, et je suis sûr que l’atelier consacré au mécénat de compétences aura bien montré l’intérêt de ce genre d’opération, pour une grande entreprise – l’exemple développé était celui de Vinci – mais aussi pour une petite société qui n’a jamais fait de mécénat et qui peut y trouver une façon simple et valorisante d’exercer sa générosité. Collectionner, créer un lieu, une fondation, offrir une aide technologique, toutes ces façons de prendre en charge l’intérêt collectif ont été, grâce à vous, étudiées, et sans doute de nouvelles idées ont germé, en entendant témoigner vos collègues asiatiques, anglo-saxons et européens.

Je me réjouis que ces deux journées vous aient permis d’aborder des sujets très pratiques, qui montrent bien que nous arrivons – et je m’en réjouis, car cela confirme le succès de la diffusion de la loi – à une nouvelle étape dans le développement du mécénat en France: comment professionnaliser le mécénat? Que recherche une entreprise mécène? Comment associer les mécènes au Conseil d’administration? Toutes ces questions essentielles, qui ont été traitées dans vos ateliers, montrent bien que nous avons largement dépassé le stade du «pour ou contre» et que du «pourquoi», nous sommes progressivement mais irrémédiablement passés au «comment»: Comment monter un projet commun? Comment faire du mécénat un outil de diversification des publics?

Le mécénat n’est pas une simple affaire d’argent, ce séminaire l’aura – s’il en était besoin – une nouvelle fois rappelé. Le mécénat est avant toute chose un partenariat, une addition, une libération de différentes énergies, qui se nourrissent et se renforcent mutuellement. Grâce à lui, le milieu culturel peut bénéficier des compétences et des réseaux des responsables des entreprises, dans de nombreux domaines: communication, relations avec les publics, gestion de projets, meilleure insertion de la culture dans le tissu local.

Je le rappelle, comme le montre le présent colloque, organisé grâce à la mission Mécénat du ministère que je remercie de son travail, le mécénat n’est en rien le signe d’un quelconque désengagement de l’Etat. Au contraire il offre une chance unique à tous les acteurs culturels de trouver des appuis supplémentaires. Je dis bien à tous les acteurs culturels car le mécénat ne concerne évidemment pas les seuls grands établissements parisiens.

Le mécénat est en effet un enjeu réel pour l’attractivité de l’ensemble de nos territoires dans leur diversité, et les représentants des villes de Pittsburgh aux Etats-Unis, de Lille en France, du festival des Eurockéennes à Belfort, du festival de Marseille, du festival Nuits de Champagne à Troyes, qui ont animé les ateliers sur ce sujet, ne me contrediront pas.

Je sais que de nombreux directeurs régionaux et représentants de chambres de commerce m’écoutent et je tiens à leur dire que le mécénat de proximité, le mécénat des petites et moyennes entreprises et industries, est un axe central de ma politique dans ce domaine. La richesse culturelle du territoire d’implantation d’une entreprise est un atout crucial de sa réussite, de son attractivité de sa compétitivité et de la qualité de vie et de l’environnement de ses cadres et de ses employés, et les entreprises qui se sont lancées dans le mécénat l’ont bien compris.

Vos rencontres, qui ont associé acteurs européens, américains et asiatiques, ont mis en avant l’enjeu international du mécénat. De nombreuses entreprises françaises implantées à l’étranger soutiennent des projets culturels et artistiques, comme le montrent, par exemple, la Fondation Face de New York, ou l’apport des entreprises françaises à la Chine lors des années croisées France-Chine. Inversement, la générosité de nos amis étrangers s’exerce pleinement en France et je tiens encore une fois à rendre hommage aux associations d’amis américains qui soutiennent avec passion nos plus grands établissements. Je n’oublie pas les autres nombreux mécènes étrangers, et je pense par exemple à la générosité des mécènes asiatiques qui ont permis la rénovation du musée Guimet.

Ces gestes nous rappellent que le mécénat est aussi une grande chance pour le dialogue des cultures. Les échanges culturels et artistiques permettent une meilleure connaissance et un plus grand respect de l’autre, le mécénat en devient progressivement un vecteur privilégié.

Je souhaite à mon tour, à l’issue de ces rencontres qui, comme je l’ai déjà dit, marquent un tournant dans l’évolution du mécénat en France, ouvrir quelques voies d’avenir.

Ce séminaire a montré l’importance capitale du dialogue, du partage des expériences et des «bonnes pratiques». En ce domaine comme en d’autres, je crois aux vertus de l’échange et de l’exemple. C’est pourquoi je souhaite, pour poursuivre dans cette voie, que soient organisées des rencontres bilatérales au niveau européen – et la première aura lieu dès cette année avec l’Allemagne – afin de confronter nos pratiques et nos législations dans une perspective de progrès réciproques.

Je souhaite également un renforcement de l’expertise des Drac dans ce domaine, en lien avec les chambres de commerce et d’industrie, pour l’aide au montage de projets de mécénat, en réponse à la demande largement exprimée par les institutions culturelles d’être accompagnées professionnellement dans leurs démarches de mécénat.

Je crois, je vous l’ai dit, à l’addition des énergies. Je suis également convaincu que nous devons mutualiser nos efforts pour accroître la visibilité de la France à l’étranger. J’envisage, dans cet esprit, la constitution d’un club du mécénat associant nos institutions culturelles les plus prestigieuses afin de proposer aux mécènes étrangers des facilités d’accès et des services communs, qu’ils soient mécènes de l’une ou de l’autre institution.
Je vous remercie tous, encore une fois, de vous être engagés dans cette réflexion collective. J’y suis très sensible car, vous le savez, ce sujet me tient particulièrement à cœur.

Je forme enfin le vœu que l’année 2006 soit riche de nouveaux partenariats, que le mécénat tisse encore des liens solides entre les hommes, au cœur de nos régions, comme dans le monde entier.

Et si je ne peux participer à votre dîner de clôture ce soir, après avoir eu le plaisir de vous accueillir rue de Valois jeudi dernier, c’est parce que je vais assister, au centre dramatique national de Gennevilliers, à la dernière représentation, dans la mise en scène de Bernard Sobel, à la pièce d’Alexandre Nicolaï;evitch Ostrovski intitulée Don, mécènes et adorateurs, qui est, au- delà de la critique de la société russe de la fin du XIXe siècle, d’abord un hymne et un appel intemporels au rayonnement et à la passion de l’art vivant, que nous partageons tous.

Je vous remercie.

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