DANSE | SPECTACLE

Kreatur

11 Jan - 12 Jan 2018

Pièce pour quatorze danseurs, Kreatur, de Sasha Waltz, développe une danse contemporaine précise, pointue et fascinante. Cultivant une complexité dépouillée jusqu'au minimalisme, la chorégraphe allemande met en lumière un autre vocabulaire du mouvement et du vivant : mi-entomologique, mi-humain, mi-robotique.

Il y a d’abord du son. Comme une pulsation, la pièce chorégraphique Kreatur, de Sasha Waltz, est plongée dans l’ambient du groupe berlino-new-yorkais Soundwalk Collective. Une texture sonore composée à partir de sons enregistrés dans des buildings et usines symbolisant la force et le pouvoir. Univers industriel et industrieux, puissance des outils… L’épaisseur de la musique rejoint le décor : minimaliste et amorti, avec une balafre lumineuse pour sangler délicatement l’espace de la danse. Avec Kreatur, la chorégraphe allemande Sasha Waltz livre une pièce pour quatorze danseurs, savamment structurée. Le spectacle révèle des créatures dansantes limitrophes, entre grouillement entomologique et précision mécanique. Gestes mi-fluides, mi-saccadés, comportements de groupe à la fois primitifs et élaborés… La pièce cultive un vocabulaire hybride, entre entités organiques et artificielles. Et évitant les caricatures, la chorégraphie conjugue minimalisme et complexité.

Kreatur de Sasha Waltz : une danse contemporaine mi-organique, mi-digitale

Kreatur, de Sasha Waltz, prend ainsi les traits d’une création chorégraphique très actuelle. Mobilisant un vocabulaire de mouvements aussi étonnant que peut l’être, aujourd’hui, celui des créatures souples de l’entreprise Boston Dynamics, par exemple. Lesquelles de créatures robotiques se meuvent avec une infinie dextérité, et cette légère raideur laissant deviner une force physique peu commune. Sur scène, quatorze danseurs interagissent, font bloc, se déploient, se heurtent, forment un sorte de grouillement organisé. Mais par quelles intentions ? Quelle logique ? La pièce Kreatur ouvre la question. Entre force et faiblesse, entre carapace et mollesse, le groupe et les individus construisent des structures étonnantes. Mi-insectes, mi-humains, mi-robots… Le vivant, ici, explore sa nouvelle réalité. Entre faiblesse et toute puissance. Un spectacle dont la beauté repose notamment sur la symbiose des créateurs entre eux.

Un projet pluriel (avec Soundwalk Collective, Urs Schönebaum et Iris van Herpen)

À l’approche du vingt-cinquième anniversaire de sa compagnie (Cie Sasha Waltz & Guests), Sasha Waltz, pour Kreatur, s’est effectivement entourée d’artistes aussi pointus et interdisciplinaires qu’elle. La musique est ainsi composée par Soundwalk Collective, un groupe proche de l’art et de l’architecture avec de nombreuses participations à des événements comme la Biennale de Venise ou la Documenta. Le design lumineux a quant à lui été conçu par Urs Schönebaum, un artiste également habitué aux collaborations interdisciplinaires (avec Marina Abramovic, Vanessa Beecroft, Dan Graham, Michael Haneke, Robert Wilson…). Et les costumes sont une création d’Iris van Herpen, qui a notamment habillé Björk pour Biophilia. Conjuguant complexité et épure minimalisme, Kreatur semble explorer les formes du vivant mouvant. De carapaces piquantes en corps souples dénudés, les entités oscillent entre protection et dénuement. Pour un spectacle agile, empreint de questions difficiles, posées avec élégance et précision.

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