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Vraisemblances

«Vraisemblances» explore le champ de la photographie contemporaine. Avec Valérie Belin, Sonja Braas, Petros Chrisostomou, Zelda Georgel, Dionisio Gonzalez, Scarlett Hooft Graafland, Carine & Elisabeth Krecké, David Levinthal, Vik Muniz, Claire-Lise Petitjean, Philippe Ramette et Boyd Webb.

Valérie Belin, Sonja Braas, Petros Chrisostomou, Zelda Georgel, Dionisio Gonzalez, Scarlett Hooft Graafland, Carine & Elisabeth Krecké, David Levinthal, Vik Muniz, Claire-Lise Petitjean, Philippe Ramette, Boyd Webb
Vraisemblances

Dès les débuts de la photographie, deux voies se sont ouvertes à elle : d’un côté, la description du monde réel, dans laquelle elle excelle; de l’autre, l’invention de mondes fictifs. La première a imposé sa loi, alors que la deuxième est restée marginale et intermittente. Même chose au cinéma, dans le partage entre l’héritage des Frères Lumière et celui de Georges Méliès. De l’autoportrait en noyé d’Hippolyte Bayard aux photographies spirites de toutes sortes, des tabletop installations aux logiciels de traitement d’images, la photographie n’a cessé de revendiquer sa part d’invention et d’illusion.

Aujourd’hui, la ligne de partage est plus ténue que jamais. Nous sommes dans l’ère du soupçon, des vrais-faux passeports, des reportages truqués, des simulacres et simulations en grandeur réelle, de l’irréalisme généralisé. Une partie de la photographie tente bien de réhabiliter les notions de document et de description, dans un effort de refondation non dépourvu d’un certain moralisme. Mais le mal est là. Il reste à certains artistes le parti d’en rire ou d’en jouer, en travaillant à la création de «réalités fictives» ou d’ «illusions véridiques», qui apparaissent comme autant de petits virus destinés à perturber le grand corps anesthésié du réel. Certes, cela suppose de renoncer à l’héroïsme des grands espaces de la vérité ; et d’opter pour un monde miniaturisé, modélisé (dans les deux sens du terme : modèle abstrait/modèle réduit).

Mais pourquoi fabriquer des mondes irréels plutôt que de puiser dans l’infinie étrangeté du réel ? Pour le plaisir de l’invention et de la performance ? Car il ne s’agit pas de redoubler l’existant, fût-il lui-même semblable à une illusion inventée de toutes pièces. Ce qui est en jeu, c’est la création de mondes décalés, déphasés, ludiques et obsessionnels à la fois, qui sont autant de petits triomphes sur la lourde authenticité des choses. Tous les degrés de l’illusion sont ici repérables : le trompe-l’oeil classique ou comique, la mise en scène ou la performance, le trucage, le jeu sur l’échelle. Toute la panoplie et les accessoires d’une pratique dont il ne faut pas oublier qu’elle est faite pour la photographie , entièrement construite pour et dans la boîte noire, et donc doublement illusoire. Et qui en cela garde miraculeusement quelque chose de la magie de la baraque foraine.

Régis Durand, Avril 2007.

Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Antoine Isenbrandt sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.

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