DESIGN | CRITIQUE

Vanille

PMoïra Dalant
@02 Fév 2012

A la galerie Chez Valentin, pour l'exposition " Vanille", les artistes britanniques Nicolas Deshayes et George Henry Longly présentent une exposition-réflexion sur les objets qui peuplent notre paysage urbain et hantent notre quotidien routinier. Les sensations sont allées se réfugier dans quelques recoins de l’espace que les œuvres n’occupent pas.

Vanille, Exposition

Haven’t We Met? Of Course We Have. Quoi de plus accueillant qu’une œuvre qui s’adresse au visiteur dès son entrée dans l’espace de la galerie ? C’est toutefois l’envers du décor que nous voyons quand nous entrons dans les lieux : l’arrière de bannières ou panneaux publicitaires peut-être, dans lesquels sont coincés quatre oreillers bigarrés, objets des artistes au repos, ou objets de rebus abandonnés par leurs anciens propriétaires ?

Une fois cette «porte» franchie, nous pénétrons dans un lieu froid, déserté par l’homme : un espace en jachère ou en devenir, dont les actants auraient quitté les lieux abruptement. C’est ce que suggèrent les deux moulages de gants de travail abandonnés sur des présentoirs en marbre.

George Henri Longly questionne le mobilier urbain qui accompagne notre quotidien : avec Thinking and Dancing, miroir fumé et sérigraphié, il rend hommage à la laideur des panneaux publics d’information, de même avec Chocking Beef, présentoir en bois et marbre, dont les couleurs hideuses et la forme rappellent un design post-moderniste, se voulant décoratif et ultra-utilitaire. Même les titres des œuvres invitent à regarder l’ensemble d’un œil ironique.

George Henri Longly semble s’amuser à interroger la laideur qui nous entoure, la réappropriation de savoir-faire anciens qui banalisent la culture. Les divers objets textiles teintés (oreillers, tabliers pliés soigneusement) qui ornent le mobilier rappellent une technique africaine ancestrale, réutilisée par le mouvement hippie dans les années 60 puis de nouveau au milieu des années 90 ; autant de réappropriations incessantes qui font perdre de vue le dessein originel d’une technique ou d’un objet.

Nicolas Deshayes répond à l’univers désenchanté de George Henry Longly avec Sels, des panneaux d’acier zingué et iridescent, disposés le long des trois murs de la galerie, assez bas pour faire penser à des pissotières, clin d’œil possible aux «piss paintings» de Warhol.
S’inspirant des techniques industrielles de prototypage et de packaging, Nicolas Deshayes a fixé sur les panneaux d’acier, des reliefs plastiques thermoformés dont les motifs suggèrent une matière liquide figée dans son mouvement, créant des espaces cloisonnés très suggestifs.
Une manière très technique d’évoquer un lieu à la fois commun et tabou, lieu de passage, à la fois hygiénique et crasseux, que l’homme habite quelques instants tout au plus.
Le long des murs, à même le sol, Nicolas Deshayes dispose de fines feuilles de caoutchouc noir, dont certains coins sont souillés par des empreintes de chaussures d’homme, en positif. Un dispositif qui suggère de nouveau une vision de l’envers du décor, d’un lieu de passage, contaminé puis abandonné.

L’exposition dans son ensemble a des allures d’exposé technique dont la vie s’est exilée, et l’imaginaire par la même occasion, et dont les sensations sont allées se réfugier dans quelques recoins de l’espace de la galerie que l’œuvre d’art n’occupe pas.

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