DANSE | SPECTACLE

Uprising / The Art of Not Looking Back

14 Fév - 29 Fév 2012

La manière forte d’Hofesh Shechter, jeune chorégraphe et compositeur anglo-israélien, combine puissance plastique, danse survoltée et musique percussive avec un sens aigu de l’attaque du plateau. Pour son troisième passage au Théâtre de la Ville, il reprend Uprising (2006) et The Art of Not Looking Back (2009).

Uprising / The Art of Not Looking Back

Hofesh Shechter

En deux saisons au Théâtre de la Ville où il a déclenché une onde de choc avec des pièces chorégraphiques qui, comme l’époque, sont pure fragmentation, pure tension et pur rythme, Hofesh Shechter s’est imposé comme une évidence.

Le retour à Paris de cet Israélien installé depuis 2002 à Londres où il a fondé sa compagnie et créé des pièces à la force rare et avec une impressionnante maîtrise du groupe sur un plateau, est salué comme un événement. En témoigne sa présence au Théâtre des Abbesses pour une durée exceptionnelle avec la création 2009, The Art of Not Looking Back, une pièce autobiographique pour six danseuses, qui fouille au scalpel ses propres émotions enfouies et la reprise d’Uprising (2006), Insurrection, une pièce musclée et militante pour sept danseurs qui l’a révélé à la critique et au public britannique.
Avec une énergie éclatante qu’il capte et transforme en danse ou en musique – car ce jeune prodige est aussi reconnu comme batteur, percussionniste et compositeur –, Hofesh Shechter incarne la génération Ipod qui mixe arts visuels, art du mouvement, rythmes éclectiques et art du sampling.
D’où une danse à toute vitesse connectée au monde contemporain et toujours “en réseau”, une danse organique et combative qui doit autant à la rue qu’aux studios où il a été formé à l’Académie de danse et de musique de Jérusalem et à la Batsheva Dance Company à Tel Aviv. «La danse est un langage direct en relation avec l’espace, le monde social et politique, la sphère intime… C’est pourquoi je cherche à incorporer toutes ces énergies pour en faire sentir l’intelligence et l’émotion et à connecter le public avec elles », confie Hofesh Shechter. Pour lui il s’agit moins de transmettre à ses interprètes des formes qu’une émotion en actes, une intensité. Hofesh Shechter aime le travail collectif en studio où il a découvert sa propre physicalité et où il se « connecte à son propre corps pour communiquer à ses danseurs une énergie venue de l’intérieur». The Art of Not Looking Back est à cet égard un “challenge” pour celui qui fonctionne à l’instinct et qui a souhaité « se mettre dans la peau d’une femme pour rechercher les émotions, la vérité et le mystère des interprètes».
Portée par des danseuses sous haute tension dont l’énergie est pulsée par des percussions tribales et un rock rageur, cette pièce pointe, le temps d’une courte fresque excédée et sauvage, les contradictions et les difficultés d’être femme. Dressées frontalement près de la rampe, tour à tour guerrières, pionnières ou victimes, les danseuses hypnotisent, dans d’étonnants passages au sol, les regards avec des mouvements naturels ou étranges. Un engagement dont Hofesh Shechter se dit impressionné. The Art of Not Looking Back raconte aussi “une histoire vraie” et intime. Hofesh Shechter nous l’apprend en voix off: sa mère l’a abandonné à l’âge de deux ans. D’où cet art de ne pas (trop) regarder en arrière, cette furieuse envie de vivre au présent et ce besoin irrésistible de travailler ici et maintenant sur le fil tendu entre passé et avenir. Hofesh Shechter rappelle avec fulgurance que si la danse peut être une expérience de la révolte et de la colère, elle est aussi libératrice et créatrice.
Un art de l’échange où l’homme se construit au présent à travers l’autre.

critique

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