ART | EXPO

Surface Proxy

16 Avr - 21 Mai 2015
Vernissage le 16 Avr 2015

L’exposition présente des images au statut de substitut: des impressions jet d’encre sur des toiles en lin, qui enveloppent des sculptures impression 3D de prototypage. Le point de départ de ce travail sont des fragments d’architecture et de sculptures médiévales françaises qui ont atterri dans les collections de musées américains.

Clément Valla

Surface Proxy

Pour cette série «Surface Proxy», le point de départ de la réflexion de Clément Valla sont des fragments d’architecture et de sculptures médiévales françaises qui ont atterri dans les collections des musées de New York et Providence, où l’artiste vit et travaille. Les objets de ces institutions variées ont été choisis car ils portent les cicatrices visibles de leur transformation d’ornements architecturaux fixes (en France) en œuvres sculpturales autonomes (à New York et Providence). L’ensemble des objets qui résulte de ce choix s’organise autour des thèmes de l’éphémère, de la permanence, de la reconstruction, de la conservation et de la restauration.

Clement Valla a employé ces reliques historiques comme une base pour un processus complexe de remédiation. A l’aide de 123d catch, une application qui permet aux usagers de créer des scans 3D de tous les objets ou presque, Clément Valla a produit des modélisations 3D de ces fragments architecturaux. Ces modèles 3D ont été ensuite numériquement drapés à l’aide de Blender, un logiciel de dessin et d’animation 3D, et la surface de l’objet originel a été ensuite posée sur cette surface de drapage. Après ce processus de remédiation numérique, les objets virtuels ont été à nouveau convoqués dans le monde réel. La surface est imprimée à l’aide d’une imprimante jet d’encre, et drapée sur une impression 3D de l’objet. L’objet est ainsi revêtu de sa propre image.

Afin de reproduire les fragments pour sa propre collection, Clément Valla utilise un procédé connu sous le nom de photogrammétrie: les objets sont photographiés sous des angles multiples, puis un modèle 3D est produit par triangulation à partir de ces multiples images. Les origines de la photogrammétrie sont intrinsèquement liées à un fonds médiéval. La technique a été inventée par un mathématicien français en 1849 et perfectionnée dans la seconde moitié du 19ème siècle par Albrecht Meydenbauer, un architecte prussien qui avait pour tâche de faire l’inventaire des monuments historiques se trouvant dans un état proche du délabrement. Une chute depuis une cathédrale gothique, qui faillit lui être fatale, convint Albrecht Meydenbauer d’employer «l’échafaudage magique» de la photogrammétrie — qui permet de mesurer et modeler, mais à distance. Les logiciels contemporains de photogrammétrie ont rendu largement accessible ce procédé autrefois réservé aux scientifiques.

Cette démarche s’inscrit dans la logique des recherches précédentes de Clément Valla, autour de ce que Harun Pharocki a nommé «images opératoires» — des images qui relèvent d’une opération, et se caractérisent par leur dimension esthétique non-intentionnelle. Dans la photogrammétrie, les photographies deviennent un moyen en vue d’un processus plus large, plutôt qu’une fin en soi.

Clément Valla met en relation cette histoire alternative de la photographie avec les discussions contemporaines sur le flux des images, les réseaux sociaux, le «big data», et les technologies de surveillance, autant d’exemples où de la valeur est créée en agrégeant des ensembles d’images. L’usager construit de manière erronée son approche des flux d’images s’il l’envisage comme ayant à voir avec les images en elles-mêmes, alors que les compagnies privées et les instances en charge de la surveillance font dériver la valeur des relations entre les images; leurs méta-données. Comme dans la photogrammétrie, les images sont alors un moyen plutôt qu’une fin.

Les modèles 3D produits par photogrammétrie sont des images dans un sens très littéral: tirées de technologies optiques, elles sont formées, sur l’écran d’ordinateur, en enveloppant et pliant des images plates autour de volumes 3D creux. La promesse portée par le scan et la fabrication 3D est que nous serons capables de reproduire des objets. Mais en vérité, nous obtenons des images en 3D. Dans ces œuvres, Clément Valla met l’accent sur la confusion grandissante entre l’image et l’objet.

critique

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