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Sons & lumières, une histoire du son dans l’art du xxe siècle

22 Sep - 03 Jan 2005
Vernissage le 21 Sep 2004

Quelles ont été et sont les relations entre la musique et les arts plastiques depuis le début du siècle ? Trois thématiques : l’abstraction, les vibrations sonores comme matériaux et le bruit. Des œuvres des plus grands artistes modernes et contemporains, et des créations à expérimenter.

Stephen Beck, Joseph Beuys, Boris Bilinsky, John Cage, Marcel Duchamp, Stuart Davis, Oskar Fischinger, Rodney Graham, Duncan Grant, Raoul Hausmann, Gary Hill, Vassily Kandinsky, Paul Klee, Frantisek Kupka, La Monte Young et Marian Zazeela, Ben Laposky, Piet Mondrian, Bruce Nauman, Georgia O’Keeffe, Yoko Ono, Nam June Paik, Zdenek Pesánek, Francis Picabia, Jackson Pollock, Robert Rauschenberg, Hans Richter, Luigi Russolo, Arnold Schönberg, Paul Sharits, Steina et Woody Vasulka, Bill Viola, James & John Whitney, Thomas Wilfred
Sons & lumières, une histoire du son dans l’art du xxe siècle

Le Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, présente la plus vaste manifestation consacrée aux relations entre la musique et les arts plastiques au XXe siècle depuis l’exposition Vom Klang der Bilder à Stuttgart en 1985.
Dans son poème Correspondances, Baudelaire écrivait que «les couleurs, les parfums et les sons se répondent». Le XXe siècle, souvent considéré comme un moment de convergence et de dialogue des arts, a abondamment décliné ce credo. Tandis qu’avec l’essor de l’abstraction, autour de 1910, la peinture cherche une correspondance avec cet art abstrait par excellence qu’est la musique, les nouveaux médias, nés du développement de l’électricité, prennent le relais de ce mythe ancestral. Les arts de la lumière, le cinéma et la vidéo offrent tout au long du siècle un terrain d’investigation particulièrement fertile aux confrontations entre l’image et le son. Parallèlement, les pratiques créatrices se nourrissent d’une réflexion critique sur les possibles équivalences entre la vue et l’ouïe : à partir de processus artistiques incluant des notions telles que le hasard, le bruit non-hiérarchisé et le silence, les nouvelles approches de la musique liées à la performance mettent en doute l’idéal des correspondances. À la question posée par l’esthétique romantique puis par la génération symboliste : «Peut-on traduire les images en son et réciproquement ?», l’art du XXe siècle offre des réponses multiples et contrastées, suivant tantôt le fil de l’utopie, tantôt celui d’une pure jouissance des sens.

Le parcours de l’exposition Sons & Lumièresse décline ainsi, sur 2100 m2, en trois parties thématiques, avec plus de 400 œuvres souvent inédites qui sont autant d’expériences sensorielles singulières. Il met en évidence les moments les plus significatifs de l’interaction entre la musique/ le son et les arts visuels. Outre les œuvres d’artistes prestigieux tels que : Joseph Beuys, John Cage, Marcel Duchamp, Stuart Davis, Oskar Fischinger, Rodney Graham, Raoul Hausmann, Gary Hill, Vassily Kandinsky, Paul Klee, Frantisek Kupka, La Monte Young et Marian Zazeela, Piet Mondrian, Bruce Nauman, Georgia O’Keeffe, Yoko Ono, Nam June Paik, Francis Picabia, Jackson Pollock, Robert Rauschenberg, Hans Richter, Luigi Russolo, Arnold Schönberg, Paul Sharits, Bill Viola, James & John Whitney, etc…, le public sera confronté à des expériences originales et parfois inédites, élaborées par des artistes au rôle pourtant essentiel : Boris Bilinsky, Duncan Grant, Ben Laposky, Zdenek Pesánek, Stephen Beck, Steina et Woody Vasulka, Thomas Wilfred…
Un grand nombre de ces œuvres sera présenté pour la première fois en France.

Le parcours
Trois thèmes sont successivement abordés dans le parcours. Ils rendent compte des différentes formes de dialogue entre le visuel et le sonore développées au XXe siècle.

La première partie présente le devenir des correspondances baudelairiennes, à partir d’une abstraction picturale tentée, comme chez Kandinsky, les synchromistes ou Klee, par l’immatérialité de la musique. Très tôt, la peinture s’affranchit progressivement de son support fixe pour devenir couleur en mouvement et gagner la dimension temporelle, grâce aux fameux « orgues chromatiques » (Vladimir Baranoff-Rossiné…), dont l’idée lointaine remonte à l’époque baroque, et aux rouleaux (Viking Eggeling…), jeux de lumière (Thomas Wilfred…) et autres dispositifs jusqu’aux premiers chefs-d’œuvre du cinéma abstrait (Hans Richter, Oskar Fischinger, Len Lye…). Les œuvres abstraites présentées dans la première partie expriment la recherche d’analogies musicales trouvant parfois appui sur un accompagnement instrumental. Leur champ de référence s’étend de la musique classique, Bach constituant un modèle permanent, aux compositions d’avant-garde (Arnold Schönberg…), jusqu’au jazz et au boogie-woogie (Stuart Davis, Piet Mondrian…).

Dans la deuxième partie, l’exposition aborde un univers sensiblement différent : celui où l’idée de matérialiser le son (par sa transcription, son empreinte, sa conversion au sens où l’entendent les nouveaux moyens électriques) conduit à faire des vibrations sonores l’un des matériaux premiers de l’œuvre.
Dès les années 1920, le cinéma procède, avec l’invention de la piste sonore, à la « photographie du son » (Rudolf Pfenninger, puis Norman McLaren…). Cellules photoélectriques et oscilloscopes sont pris à partie dans des œuvres à caractère expérimental, misant sur la traduction électrique directe entre sons et images (Raoul Hausmann, Ben Laposky…).
Les années 1960-70 renouvellent en profondeur la problématique, en développant la forme de l’environnement : l’œuvre devient un dispositif de perception globale plongeant le spectateur dans l’expérience physique des vibrations sonores et lumineuses. Se référant à la suspension de la conscience propre au rêve, certains artistes invitent à une expérience méditative : les ondes, quelles soient sonores ou lumineuses, définissent le vocabulaire d’un nouveau paysage audiovisuel ouvert à la plénitude de l’expérience sensorielle (James et John Whitney, Brion Gysin, La Monte Young et Marian Zazeela, Paul Sharits…). D’autres artistes, en revanche, utilisent l’énergie et la force de pression acoustiques jusqu’aux limites de la tolérance des sens (Bill Viola, Gary Hill…).
À cette époque, l’idée d’écriture du son est relayée par les premières œuvres d’art vidéo, qui tirent un parti audacieux des interférences entre les signaux sonores et visuels, marquant l’avènement de nouveaux langages audiovisuels (Nam June Paik, Steina et Woody Vasulka…).

La troisième partie, enfin, est en forme d’interrogation. Donnant la parole au «bruit» exploré par les futuristes, à John Cage et au mouvement Fluxus, elle explose les aspects les plus iconoclastes de la thématique.
Tandis que Luigi Russolo offre un modèle musical basé sur les textures hétérogènes et accidentées du bruit urbain, qui trouve ses équivalences plastiques dans le collage et les effets tactiles de la matière, Marcel Duchamp procède à une épure des procédés compositionnels, en utilisant les lois du hasard. C’est cette double filiation que l’on voit triompher via la figure tutélaire de John Cage, dans les années 1960 avec Fluxus, qui propose une philosophie engagée selon laquelle les frontières entre l’art et la vie sont totalement abolies. Les œuvres présentées dans cette partie s’emploient à défaire le mythe des correspondances avec force ironie : hasards et accidents dictent l’interférence entre les arts et conduisent en dernière instance jusqu’à l’expérience du silence (Joseph Beuys, Bruce Nauman…).
Enfin, avec quelques installations très contemporaines (Rodney Graham…), qui s’inscrivent dans les réflexions retracées tout au long du parcours, l’exposition offre un épilogue ancré de plain-pied dans le XXIe siècle, laissant la voie ouverte à de nouvelles interprétations.

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