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Que sais-je? Livres et éditions d’artistes de la collection de la Fondation Serralves

16 Mai - 06 Sep 2015
Vernissage le 16 Mai 2015

Atlas, dictionnaires, encyclopédies sont des modèles reproduits (et parodiés) de façon récurrente par l’art du XXe siècle. L’exposition, qui présente des livres et des éditions d’artistes produits entre les années 1960 et nos jours, permet de montrer la volonté des artistes de repenser ce que nous considérons connaissance ou information.

Bas Jan Ader, Pedro Barateiro, Robert Barry, Lothar Baumgarten, Alighieri Boetti, John Bock, Marcel Broodthaers, Stanley Brouwn, Paulo Bruscky, Ernst Caramelle, Miguel Carneiro, Isabel Carvalho, Tacita Dean, Hans-Peter Feldmann, Robert Filliou, Ana Jotta, Dayana Lucas, Charlotte Moth, Bruno Munari, Paulina Olowska, Adrian Piper, Ad Reinhardt, André Romão, Dieter Roth, Allan Ruppersberg, Batia Suter, Richard Tuttle, Ricardo Valentim, Ben Vautier, Christopher Williams, !Von Calhau!

Que sais-je? Livres et éditions d’artistes de la collection de la Fondation Serralves

Que sais-je? est le nom de l’encyclopédie de poche la plus renommée. Fondée en 1941, cette collection a été conçue pour transmettre au grand public, des connaissances dans les domaines les plus divers. 3800 titres de 2.500 auteurs ont été publiés depuis son origine.

En quoi ces publications, en plus de certains de ses titres consacrés à ce thème, pourront-elles avoir un rapport avec l’art contemporain?

Atlas, dictionnaires, encyclopédies — formes canoniques d’engranger et de transmettre la connaissance — sont des modèles reproduits (et parodiés) de façon récurrente par l’art produit par les premières avant-gardes du XXe siècle. Cet intérêt s’explique par la volonté de repenser ce que nous considérons connaissance, information, communication.

A une époque où écoles, académies et salles de cours sont des modèles qu’artistes et curateurs utilisent de plus en plus, et que les formats éminemment pédagogiques — comme les ateliers, séminaires et conférences — occupent une place de premier plan dans les innombrables expositions, cette exposition-ci, qui présente des livres et des éditions d’artistes produits entre les années 1960 et nos jours, permet d’appréhender comment ces moyens ont toujours présenté des visions alternatives à ce que «transmettre des connaissances» peut signifier. Ils nous obligent à saisir comment l’efficacité et la quantité d’information des systèmes de communication font que l’art et le geste artistique risquent d’être identifiés, rangés par catégories et transformés en information avant même d’avoir pu commencer à être de l’art — c’est-à-dire comment l’information peut castrer la curiosité.

Beaucoup d’entre eux reproduisent avec ironie des façons d’engranger et de présenter des informations issues de mondes prétendument éloignés de l’art, notamment ceux de la science, des archives, de la publicité et de l’entrepreneuriat. Présentant des listes, des tableaux, des graphiques ou tout simplement des textes d’artistes — prouvant ainsi que ces derniers peuvent contribuer à la production de connaissances aussi bien que les textes d’essayistes, de philosophes et de scientifiques — ces éditions imposent la production artistique comme une forme alternative de pédagogie.

Bibliothèques et livres sont des dépôts de savoir. Les livres d’artistes refusent le lien entre connaissance et parole claire, autoritaire, obéissante aux lois de la science, du fait de la conviction que l’art est un espace où l’on n’enseigne pas, où l’on n’apprend pas mais où est mis en circulation l’objet qui sera produit, le chemin qui sera parcouru. Le livre d’artiste rend plus complexes les catalogages traditionnels de la bibliothèque, car ils en désorientent leurs lois.

Les artistes présents dans cette exposition interrogent le rapport de leur travail avec les modèles de transmission de la connaissance — preuve en est le recours à la parodie de dictionnaires, encyclopédies, méthodes pédagogiques, ainsi que la destruction délibérée de l’information véhiculée par les revues et journaux. Ce sont des gens à la recherche de la connaissance, des gens qui empruntent les sentiers les moins pratiques de la vie, des gens qui essaient d’inventer un monde nouveau, mais qui, au contraire de la traditionnelle association savoir/clarté, produisent des objets sans se préoccuper de savoir s’ils sont immédiatement compris, motivés par une certaine façon de faire naître des idées et de penser autrement les territoires intellectuels qui nous sont familiers. Chez eux, l’allusion ironique à l’ordre nous rappelle que, dans l’art, la confusion peut être un fait vraiment merveilleux.

Ricardo Nicolau

L’exposition «Que sais-je?» est une coproduction de la Fondation Serralves, Porto et du CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux.

Commissariat
Ricardo Nicolau

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