ART | EXPO

Portraits grandeur nature

09 Fév - 15 Mar 2008

Des noms d’artistes connus sont disséminés tout au long du parcours de l’exposition. Sous cette  apparence calligraphique et chromatique, se  cache l’ironie mordante  d’Agnès Thurnauer, qui interroge avec humour la grande tradition de l’histoire de l’art. Bacon  devient Francine,  alors qu’Opalka est désormais Romane et Broodthaers, Marcelle.

Agnès Thurnauer
Portraits grandeur nature

Les “portraits”, qui constituent le fil rouge de l’exposition, avaient à l’origine été créés en une série de badges, comme un clin d’oeil  malicieux  à une histoire de l’art essentiellement masculine. Portés à un format sensiblement sculptural, ils dépassent alors la question du changement de genre pour accéder à une véritable incarnation biographique par la  typographie,  “les  Portraits  grandeur  nature  deviennent  alors des portraits en plein » a-t-on  pu  lire  à  ce  sujet, « puisqu’il y a ajout d’une qualité et non perte de sens ». Le changement de genre, qu’il  soit d’ailleurs  à  l’égard  des  deux  sexes, n’est alors qu’un élément qui accentue la personnification de ces artistes  fameux  et  désormais  androgynes. Pour  Agnès  Thurnauer,  ces portraits grandeur nature font référence  à la  grande tradition  du portrait  dans l’histoire  de  l’art,  et  sèment  le  trouble  quant  à leur perception par leur public et leur acception littérale en general.

Dans  le  droit  fil  de  cette  réflexion  sur  le  langage de la peinture et ses résonnances dans l’histoire de l’art, Agnès Thurnauer trouve son inspiration dans des représentations liant mots et images telles qu’elles étaient pensées  au  Moyen-Age.  Cette  série  de  petits  tableaux  dits  “prédelles”   reprend  directement  la forme et l’intention des images qui bordent le bas des retables à titre de commentaires. Depuis cette posture formelle presque critique, Agnès Thurnauer utilise la peinture pour établir une correspondance entre l’écriture et l’image, la syllabation et la modulation de la perception visuelle.

Une nouvelle fois le regardeur se sent piégé et volontairement plongé dans un champ sémantique complexe où se confrontent figuration, abstraction, langage et écrit. Enfin,  Agnès  Thurnauer  introduit une nouvelle forme dans son travail conceptuel en réalisant un ensemble spectrale  de  grandes  toiles  dessinées  à  la  craie.  Elle  confère  également  une  donnée plus politique à sa réflexion. Sur fonds  d’inquiétants crânes humains, se détache, telle une litanie anti-consumériste, un message menaçant : “Fuck the market”. A double  tranchant,  cette incantation  rend hommage aux artistes maudits en même  temps  qu’elle  interroge  la  valeur  des  oeuvres  contemporaines,  et  l’arbitraire  qui préside aux lois aléatoires du marché.

critique

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