ART | EXPO

L’Heure des sorcières

01 Fév - 18 Mai 2014
Vernissage le 31 Jan 2014

La figure de la sorcière est issue de la tradition populaire. Plus récemment, elle a été récupérée par les artistes contemporains et les militants, qui voient en elle, un symbole d’affranchissement et de résistance à la norme. Point de départ de l’exposition, elle sert de tremplin pour aborder les notions de genre, de mythe et d’altérité.

Jean-Luc Blanc, Lindsey Bull, Kiki Smith, Carolee Schneemann, Victoria Vesna, L. Dalliance, Anita Molinero, Florence Doléac, Latifa Laâbissi, Ana Mendieta
L’Heure des sorcières

Touchant à l’art, à l’histoire, au militantisme et à la tradition populaire, l’exposition collective «L’Heure des sorcières» prend pour point de départ la figure de la sorcière comme métaphore de l’altérité et le symbole de résistance à la norme, qu’elle soit culturelle ou économique. Le terme de la sorcière renvoie à la construction sociale, plus qu’à la praticienne de la sorcellerie. L’exposition s’intéresse également à ces femmes qui ont été qualifiées de sorcière (par le pouvoir judiciaire, les institutions religieuses ou l’opinion publique) et celles qui s’autoproclament sorcière sans pour autant pratiquer la sorcellerie.

Au fil des siècles et des contextes géographiques, ce mot a été appliqué par les détenteurs du pouvoir à des femmes considérées comme dangereuses ou importunes. Cette dénomination, qui implique un potentiel de renversement de ce même pouvoir, a été directement récupérée par les artistes féminines, de la chorégraphe Mary Wigman, dès les années 1910, à la militante et écrivaine contemporaine Starhawk.

Dans les années 1970, la figure de la sorcière devient un symbole des luttes féministes et homosexuelles en Europe et aux États-Unis, amenant nombre de militants à réécrire l’histoire occultée des chasses aux sorcières, qui se sont déroulées en Europe et dans ses colonies du XVe au XVIIIe siècle. Dans l’imaginaire militant, la sorcière est à la fois victime et symbole de l’affranchissement. Elle est surtout victime de son indépendance et de son insoumission, et plus concrètement de superstitions, d’accusations et de violences portées contre son corps à travers les siècles. En ce qui concerne l’affranchissement, la dite sorcière possède des savoirs et de qualités qui la libèrent de l’emprise du matérialisme. Elle est souvent assimilée au rôle de guérisseuse et de botaniste, engagée dans un rapport privilégié avec le monde naturel et la spiritualité.

Plus récemment, l’image de la sorcière est également utilisée par les communautés néopaïennes féministes et «queer» — on peut citer notamment «Reclaiming» et les «Radical Faeries» — des groupes investis dans l’unification de la spiritualité et de la politique, dans le questionnement des identités ou encore dans l’art de vivre et d’agir collectivement.

À travers des œuvres, des films et des documents datant de la fin du XIXe au début du XXIe siècles, «L’Heure des sorcières» explore la circulation et l’appropriation de ce symbole bien connu de l’imaginaire populaire. Elle offre un regard sur la façon dont cette figure, ses complices mythiques et ses supposées pratiques ont été inventés, représentés et colportés au fil des siècles. Elle examine le retour de la sorcière comme incarnation radicale dans l’imaginaire militant occidental, et les leçons sociales et humaines apprises de cette figure rétrospectivement élevée au rang de proto-féministe.

La reconstruction d’une œuvre de l’artiste américaine Mary Beth Edelson datant de 1977, Propositions de Mémorial pour les 9 000 000 de femmes brûlées comme sorcières pendant l’ère chrétienne, est présentée aux côtés d’œuvres d’artistes célèbres tels que Leon Ferrari, Derek Jarman, Carolee Schneeman, Nancy Spero, ou encore celles d’une plus jeune génération comme Lindsey Bull, Camille Ducellier, Patrick Staff et Olivia Plender. De nouvelles productions de Jean-Luc Blanc, Florence Doléac, Richard John Jones et Marie Preston sont orientées autours des thèmes de la possession et du matriarcat, tant dans le cinéma que dans le folklore finistérien.

D’autres œuvres abordent des sujets plus librement associés à la thématique, à savoir: les contre-cultures, les traditions populaires, les pratiques rituelles, le communalisme ou encore le retour à la nature. Plutôt que de dresser un panorama exhaustif de la sorcière et de ses connotations, l’exposition envisage cette figure comme un tremplin pour mettre en perspective des positions variées sur le genre, le mythe et l’altérité.

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