ART | EXPO

L’Eclipse de la figure

24 Jan - 03 Avr 2014
Vernissage le 23 Jan 2014

Dans le cadre des expositions regroupées sous le nom «Les dérivés de la photographie», l’exposition présentée à l’Artothèque de Pessac, propose d’aborder la photographie à travers la disparition la figure, qu’elle est censée rendre visible. La notion de figure est envisagée au sens littéral aussi bien qu’abstrait.

Laurent Kropf, Pierre Labat, Lilly Lulay, Duane Michals, Kyoko Nagashima, Roman Opalka, Dennis Oppenheim, Philippe Bazin, Roman Signer, Leila Sadel
L’Eclipse de la figure

Il pourrait sembler paradoxal d’appréhender la photographie à travers l’éclipse de la figure, car cela revient à considérer l’absence de ce qu’elle est censée rendre visible en tant que moyen d’enregistrement du réel.

Il n’est pas anecdotique qu’un des textes fondateurs du discours sur la photographie, «Petite histoire de la photographie» (1931) de Walter Benjamin, se concentre avant tout sur la figure humaine, l’auteur allant jusqu’à écrire que «renoncer à la figure humaine représente pour la photographie l’objectif le plus irréalisable».

Au-delà de l’humain, la figure peut être tout autre chose qu’humaine, si la photographie a tant à voir avec cette notion, c’est qu’elle est un témoin de la réalité. Ainsi, selon Roland Barthes, «constater que ça a été […] pour quiconque tient une photo dans la main [est] une «croyance fondamentale» […] que rien ne peut défaire» (La Chambre claire, 1980).

Au sens premier, la notion de figure renvoie à l’apparence extérieure des choses, et désigne leur apparence sensible. C’est-à-travers des figures que le réel nous est observable. Mais la disparition de la figure n’est pas un processus anti-photographique. Au contraire, la figure qui disparaît fait émerger en négatif ou en creux, une réflexion sur l’un des aspects fondamentaux du médium photographique.

La figure s’éclipse lorsqu’elle est dissimulée, effacée, dissolue ou encore éclatée, comme c’est le cas dans des œuvres de Serge Comte, Hans-Peter Feldmann, Lee Friedlander, Laurent Kropf, Lilly Lulay, Duane Michals, Denis Oppenheim, Jacques Perconte ou Julien Tiberi.

La figure cède alors la place à l’enregistrement et à la captation de la lumière. Il ne s’agit plus d’enregistrer le réel tel qu’on le voit mais, de mettre en évidence le vocabulaire propre à la photographie en tant que médium défini par sa technique C’est le cas notamment dans les œuvres de Pierre Labat.

Lorsque la figure devient secondaire, l’œuvre tend alors vers une réalité plus vaste que celle de l’individu ou de l’objet représenté, comme c’est le cas chez Philippe Bazin ou Leila Sadel.

La figure peut aussi désigner l’image elle-même, sa fabrique et son statut, ce qui est en jeu dans les démarches de Victor Burgin, Philippe Fangeaux, Paolo Gioli et Joachim Schmid par exemple.

La figure s’absente lorsqu’une photographie saisit un corps instable et/ou évoque un corps absent, comme chez Roman Signer, ou lorsqu’une personne exposée par l’image se dirige vers sa disparition (spatialement chez Kyoko Nagashima, ou temporellement chez Roman Opalka).

D‘après un texte de Jérôme Dupeyrat, critique d’art

Avec les Å“uvres de: Philippe Bazin, Victor Burgin, Serge Comte, Philippe Fangeaux, Hans-Peter Feldmann, Lee Friedlander, Paolo Gioli, Laurent Kropf, Pierre Labat, Lilly Lulay, Duane Michals, Kyoko Nagashima, Roman Opalka, Dennis Oppenheim, Jacques Perconte, Leila Sadel, Joachim Schmid, Roman Signer, Julien Tiberi.

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