ART | CRITIQUE

H BOX

PMuriel Denet
@12 Jan 2008

La H Box, dernière création de la maison Hermès, commence sa tournée itinérante au Centre Pompidou. La H Box est une salle de projection vidéo miniature, diffusant en continu une programmation d’œuvres de jeunes artistes, produites par la marque de luxe.

Dessinée par Didier Fiuza Faustino, la boîte ressemble à une caravane de camping pliante, ou, encore, à un stand pour foire ou exposition professionnelle: elle est démontable, et transportable à volonté, toute en alu et en altu.

L’idée d’un dispositif léger et itinérant pour diffuser de l’art vidéo contemporain est séduisante. Cependant la tournée annoncée, qui passe exclusivement par des lieux d’art de prestige, recentre quelque peu l’ambition du projet. Et, autre bémol, l’inconfort des quatre seules places assises, qui, certes, nichent le spectateur au centre du dispositif, l’emprisonne aussi dans une recherche impossible de la bonne distance à un écran un poil trop proche.

Bref, contrairement aux intentions annoncées, cette boîte n’offre pas les conditions les plus favorables pour entrer de plain-pied dans les œuvres proposées, dont l’enchaînement en continu révèle par ailleurs les faiblesses. L’ennui guette parfois, notamment quand l’outil vidéo se fait instrument de transposition quasi littéral de procédés psychanalytiques (Midway).

Heureusement, les vignettes stylisées de Valérie Mréjen rappellent l’art vidéo à sa modestie de mode mineur, branché sur le réel, et habité, tout à la fois, de cinéma, de théâtre, de photographie, de jeux vidéo, voire de BD.

Pendant que ses personnages silencieux se livrent à des considérations convenues, nourries de non-dits et de malentendus, sur leur rapport aux autres, c’est à elle-même que se confronte en vain, et sans pathos aucun, la jeune femme créée par Su-Mei Tse, qui frappe sans relâche une balle virtuelle, que seules les parois blanches d’un cube effrayant de vacuité, et sans issu, lui renvoient.

Shahryar Nashat propose, quant à lui, un étonnant parallèle entre la production immatérielle de la musique, sous les doigts magiques de Glenn Gould, et celle, lourde et massive, d’une dalle de béton, mise en œuvre par de beaux et vigoureux ouvriers, virtuoses de la truelle.

Sebastián Diaz Morales ouvre enfin une fenêtre sur le monde avec un collage aléatoire de fragments de vidéos amateur, qui abusent d’effets de zoom, sur une bande son décalée emplie d’un bruit incessant de ressac.

Mais le plus troublant reste ce pastiche de propagande de l’époque dite «socialiste», par Yael Bartana, qui met en scène un jeune politicien polonais, entouré et applaudi par des pionniers à l’enthousiasme policé et souriant, pour haranguer les gradins vides, et envahis de végétation, d’un stade de Varsovie, et implorer les 3 300 000 juifs qui vivaient en Pologne avant la Seconde Guerre mondiale d’y revenir…
Au nom de l’altérité, considérée par le leader comme nécessaire à la projection dans l’avenir d’une société : l’appel claque dans le silence comme une utopie à jamais sans objet.

Alice Anderson
— Barbe bleue, 2007.

Yael Bartana
— Mary-Koszmary, 2007.

Sebastián Diaz Morales
— Oracle,
2007.

Dora García
— Film (Hôtel Wolfers),
2007.

Judit Kurtág
— Midway,
2007.

Valérie Mréjen
— Bulles,
2007.

Shahryar Nashat
— Plaque,
2007.

Su-Mei Tse
— Open Score,
2007.

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