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Empire

Le camp de réfugiés Choucha, situé en Tunisie à 5 kilomètres du poste de frontière avec la Lybie, constitue une source d’expériences et de rencontres insondables pour Samuel Gratacap. Le photographe lauréat du Prix Le Bal de la jeune création présente une esthétique épurée, qui se porte aux frontières du documentaire, tout en relevant un contexte social et politique où se mêlent les sentiments d’attente et d’abandon.

Information

Présentation
Samuel Gratacap
Empire

L’exposition «Empire» consacrée au travail de Samuel Gratacap que présente Le Bal, a aussi donné lieu à la publication d’un catalogue, en s’associant aux Editions Filigranes. L’occasion d’associer des textes et des témoignages à un travail photographique récompensé par le Prix du Bal de la jeune création. Or, ces photographies, qui résultent de plusieurs années d’immersion au sein du camp de Choucha, ne sont pas que la retranscription d’un quotidien appesanti par des drames humanitaires, culturelles et géopolitiques. Elles sont également le reflet d’une forme de langueur temporelle, laquelle semble orientée par la présence troublante d’un environnement fait de lumière et de poussière, de désolation et de gestes suspendus. Samuel Gratacap, à travers un travail d’investigation et le médium photographique ou filmique, pose la question de l’articulation entre individu et communauté, entre individu et environnement; il relève également le vacillement des frontières distinguant le politique de l’esthétique.

L’ouvrage constitue une nouvelle étape dans le projet de témoigner de l’âpre réalité que connait le camp de Choucha. Alors que l’abandon et l’incompréhension composent le quotidien de centaines de milliers de réfugiés d’origine subsaharienne ayant dû fuir la guerre en Lybie, alors que vies et récits s’entremêlent à travers des paysages portés par la beauté abstraite qu’offre le désert, le travail de Samuel Gratacap s’inscrit pareillement dans la volonté de souscrire à un discours critique à l’encontre de l’«Empire». Ce dernier ne semble pouvoir offrir qu’absurdités administratives et indifférences distanciées, ainsi que le relève le photographe : «Mon travail photographique et vidéo rend compte de l’espace-temps particulier de ce lieu de vie marqué par l’attente. L’attente liée aux différentes étapes des demandes d’asile déposées par les réfugiés qui se mêle à la tension de ces destins suspendus dans un lieu temporaire, devenu pérenne par la force des choses, pour finalement disparaître».

Samuel Gratacap (né en 1982) a suivi sa formation artistique à l’école des beaux-arts de Bordeaux, puis à l’école supérieure des beaux-arts de Marseille où il s’est orienté vers la photographie et la vidéo. Il a déjà concrétisé plusieurs projets dans des zones de transit, notamment dans le centre de rétention administrative de Marseille (2007-2008), sur l’île de Lampedusa en Italie (2010), et vit depuis quatre ans entre la France, la Tunisie et la Libye.