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Didier Marcel. Sommes-nous l’élégance

Didier Marcel emprunte au réel et sculpte sur nature. Que l’empreinte soit prise sur le vivant ou le minéral, ou que le modèle soit lui-même artificiel, le choix procède toujours d’un rapport très personnel à la banalité, à tout ce qui est ordinaire, invisible, tout se qui se fond dans le paysage.

Information

Présentation
Didier Marcel, Jérôme Mauche, Timothée Chaillou, Bruno Dumont
Didier Marcel. Sommes-nous l’élégance

Extrait de la conversation entre Didier Marcel, Timothée Chaillou et Bruno Dumont
«Didier Marcel: De toute évidence nos travaux ont en commun le modelage d’un paysage et d’une réalité. Les éoliennes, les labours ou les outils agricoles sont des éléments que je pétris pour en faire des sculptures, des installations. Mais le cinéma reste beaucoup plus puissant, puisque vous introduisez, Bruno, la question de l’homme.

Dans mon travail, l’homme, n’existe que par son absence, ce quui est un premier paradoxe. Le second est que mes installations s’adressent à un « autre » comme une expérience solitaire, un face à face avec un tableau dans lequel on entrerait; une fenêtre sur le monde, un arrêt sur image, où le sentiment serait à élucider.

Timothée Chaillou: Vos Labours sont des monochromes exprimant l’hyperéralisme de la terre, tel un morceau de croûte terrestre, une écorce, une peinture d’un relief à felur de terre. Un motif à l’échelle du paysage. Bruno, vous filmez la terre labourée, sillonnée, dans L’Humanité, La Vie de Jésus et Flandres. Ces deux derniers films, ainsi que pour TwentyNine Palms, se terminent par des corps allongés à terre –territoire de la matière primaire, de la gravité.

Bruno Dumont: La terre, c’est la valeur du sens commun. Pour un paysan, c’est ce qui compte le plus. Quand je regarde les Labours, je pense faire exactement le contraire, car là je vois une terre exacerbée. De mon côté, je filme, de la façon la plus simple la terre dans son état naturel. Il y a très peu de travail, seulement celui de l’histoire du film. D’une certaine manière le cinéma serait antérieur à la peinture car il vous remet dans une situation naturelle.

Symboliquement les Labours sont le lendemain et le cinéma la veille. Le cinéma est beaucoup plus primitif –dans ce que j’essaie de faire– et naturaliste, dans une demande de vraisemblance. Didier met le doigt sur quelque chose de vrai, juste et profond, qu’il place au-dehors, met en surface. Il retire la terre de son cadre naturel, en fait une abstraction pour en donner une représentation quasi absolue.»