ART | EXPO

Claude Closky, Animations

30 Juin - 18 Nov 2012
Vernissage le 29 Juin 2012

La pratique artistique de Claude Closky se développe au cœur des codes des représentations médiatiques. En recourant à des médiums aussi variés que le dessin, le collage, la photographie, la peinture ou les sites Internet, il réorganise méthodiquement des signes qui saturent le quotidien de notre société de consommation.

Claude Closky
Animations

«Animations» est un parcours à travers les espaces d’exposition du Quartier, divisé en trois sections, ponctué d’étapes. «Animations» est un voyage dans le temps présent, alternant gros plans et hors champs, mouvements et attentes. Dans ce lieu de passages, le visiteur met à l’épreuve sa subjectivité, sa liberté d’action. Le titre volontairement ambivalent interroge la capacité d’un centre d’art à «animer» les corps et les pensées des visiteurs, il critique également l’assimilation systématique des loisirs à du temps libre, dont l’artiste désamorce le dogme avec persévérance et humour.

Claude Closky s’est fait connaître, au milieu des années 80, avec Les Frères Ripoulin, un collectif de peintres figuratifs proches de la Figuration libre et du street art de Keith Haring, Kenny Sharf, Jean-Michel Basquiat, défendu alors par la galerie Tony Shafrazy (New York) qui produira en 1985 leur seconde exposition. Il a ensuite développé une pratique utilisant les signes médiatiques qui saturent notre quotidien (slogans publicitaires, coupures de magazines de mode ou d’économie, logos des marques ou encore statistiques). Comme l’explique l’historien de l’art Michel Gauthier, c’est dans la rencontre d’un conceptualisme désœuvré et de l’hyperactivité médiatique que se noue l’étrange destin de l’art de Closky. Dans ses œuvres, les détournements qu’il opère nous éloignent du flux des signes et des messages convenus, qui contraignent nos représentations du monde.

Au Quartier, le visiteur pourra traverser trois œuvres qui investissent des types d’imaginaires distincts: Animations zoome sur le graphisme abstrait des premiers jeux vidéo d’arcade et les recharge de signification, Illumination renvoie aux gros titres des quotidiens annonciateurs de révélations, tandis que No Choice associe en les opposant des centaines de photographies prélevées sur «la toile (d’araignée) mondiale» (world wide web). Attendre la collision entre un point et une ligne sur un écran digital peut sembler absurde mais Animations relève plutôt du registre de la vanité et délaisse la situation ludique offerte par les images pour activer un mouvement perpétuel et sans aboutissement.

Cette dimension existentielle se retrouve dans la suite d’ampoules qui s’illuminent successivement, entrainant le visiteur dans son sillon. L’ampoule placée en hauteur et éclairant temporairement des fragments de mots découpés dans des journaux tourne en dérision la croyance dans la révélation, le processus cognitif, son autorité. La relation physique aux œuvres met en exergue notre rapport au temps par le truchement des représentations: du ralentissement extrême à l’accélération dramatique. No Choice est une installation vidéo qui associe deux diaporamas synchronisés. Ils sont placés en vis-à-vis et défilent à un rythme qui rend (presque) impossible de les appréhender simultanément. Au sujet de cette pièce, le commissaire d’exposition Ali Akay rappelle que le «non choix» procède aussi du système décisionnaire des démocraties, le choix ultime d’une élection étant ramené à une opposition binaire. Ici, la profusion d’images prélevées sur Internet submerge le regardeur mais le nombre n’est pas la diversité, il tend, au contraire, à faire oublier l’altérité.

Le parcours que propose l’exposition de Claude Closky au Quartier ne délivre aucun message, elle s’oppose à la tenue d’un discours qui tendrait à opacifier les enjeux idéologiques. Claude Closky intervient toujours de manière minimale. Il calcule au plus juste sa mise en retrait, le point d’équilibre qui permettra au regardeur de prendre position. Joues! Informes-toi! Choisis! Au cœur des langages dominants, les œuvres de l’artiste s’inventent à la manière de langues mineures, des langues qui invitent à regarder et à agir autrement. Elles explorent différentes temporalités, jouent de l’élasticité du temps, elles activent notre subjectivité qui est le moteur de sa perception.
Keren Detton

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