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A Postcard from the Volcano

PMagali Lesauvage
@12 Jan 2008

L’exposition de Donovan Barrow, Gil Heitor Cortesão, Knut Eckstein et David McBride, organisée par Chris Sharp et Emilie Bannwarth à la galerie Suzanne Tarasiève, rend hommage aux médiums traditionnels pour livrer un compte rendu assez pessimiste des utopies architecturales du XXe siècle.

Empruntant son titre à un poème de Wallace Stevens annonçant avec ironie un désastre tout proche, l’exposition de la galerie Suzanne Tarasiève réunit deux artistes nord-américains et deux artistes européens autour du thème des chimères architecturales modernistes.

Chris Sharp, commissaire l’an passé de l’ironique exposition collective Evidences or This Object of Desire à la galerie In Situ, aborde ici, avec Emilie Bannwarth, le thème de la ruine, citant dans le catalogue les exemples antérieurs du Saint-Sébastien de Mantegna, adossé à une colonne romaine érodée, Turner et ses représentations de l’Incendie du Parlement de Londres, ou les gravures piranésiennes d’une Rome surpuissante mais décadente.

Le 11 septembre 2001, c’est par l’attaque d’un symbole architectural de prouesse technique, financière et politique que la civilisation occidentale a été ébranlée. Au-delà de sa simple fonction, l’architecture a depuis l’Antiquité un rôle de représentation des valeurs et de l’autorité : l’architecture est «parlante». Les architecture utopiques du XXe siècle ont, elles aussi, voulu délivrer un discours, une idéologie, qui se sont trouvés rapidement anéantis, ce dont témoignent les œuvres présentées ici.

C’est par la déconstruction d’œuvres emblématiques de l’architecture moderne que l’artiste canadien Donovan Barrow exprime cette désillusion: la Villa Savoye de Le Corbusier, représentée en maquette de cuivre tel un objet d’art, est défigurée avant d’être reproduite sur toile, dans une lumière zénithale de musée. La destruction est également le thème des œuvres de David McBride, et fait écho à la technique employée, celle du pochoir sur bois, qui est absence-présence: le bâtiment, en phase d’effacement, apparaît en négatif, déjà comme un souvenir.

Les toiles de Gail Heitor Cortesão, réalisées dans une facture élégante et des couleurs raffinées, à l’huile sous plexiglas, révèlent l’insondable tristesse des intérieurs modernistes: la solitude qui émane de Piscina (2007) est d’une grande intensité, et évoque un univers suranné de fin du monde.

Plus optimiste est le travail de l’Allemand Knut Eckstein, qui, dans la lignée du merz dadaïste, forme par un bric-à-brac de tubes, de boîtes en carton et de néons, des modèles réduits d’architectures dynamiques, imaginaires, spatiales, et amorce ainsi un retour salutaire à l’utopie, véritable moteur de la pensée architecturale.

Donovan Barrow
— Farnsworth House, 2006. Laque sur toile. 134 x 165 cm.
— Farnsworth Model, 2006. Carton, feuille de cuivre. 18 x 30 x 13 cm.

Knut Eckstein
— Drop Shop, 2006. Technique mixte. 170 x 50 x 90 cm.

David McBride
— Out of Longing Great Wonders, 2007. Huile sur bois. 119 x 91 cm.

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